Offensive de N. Sarkozy, de la droite et du Medef contre la Sécurité sociale solidaire
Posté par communistefeigniesunblogfr le 30 janvier 2011
Source : Le blog de Gérard Filoche - 30 janvier 2011
Auteur : Jean-Jacques Chavigné
Des pans entiers de la Sécurité sociale livrés aux assurances privées (1)
46 millions d’habitants des États-Unis ne disposent, aujourd’hui, de strictement aucune assurance maladie. La réforme de l’assurance maladie annoncée dans le programme de Barak Obama devait permettre d’en finir avec cette dramatique anomalie dans le pays le plus riche du monde.
C’était sans compter avec le lobby des assurances privées qui a réussi à faire reculer Obama et à lui faire abandonner son projet d’accroître largement la part des financements publics de l’assurance santé. Il lui a fallu, pour l’essentiel de sa réforme, s’en remettre aux assurances privées et à quelques mesures régulatrices. Résultats, selon deux chercheurs de l’OFCE, Christine Rifflart et Vincent Touzé[1] : cette réforme laisserait toujours, en 2019, « 23 millions de résidents américains sans assurance ».
Et ce n’est pas fini, le lobby des assureurs privés qui a largement contribué au financement des « Tea parties » et de la victoire des Républicains à la chambre des Représentants compte bien maintenant sur ces nouveaux élus pour détricoter, un à un, tous les fils de la fragile réforme d’Obama.
La leçon de cette courte histoire est évidente : quand la santé d’un pays est entre les pattes des assurances privées, il est extrêmement difficile de leur faire lâcher prise quelque en soit l’intérêt pour la santé publique. C’est pourtant le moment que choisissent Sarkozy et son gouvernement pour tenter de livrer aux assureurs privés des pans entiers de notre Sécurité sociale.
[...]
Le financement de la dépendance et le début de la fin du monopole de la Sécu
Le 16 novembre dernier, Nicolas Sarkozy annonçait que le chantier du financement de la dépendance serait bouclé à l’automne 2011. L’intervention de Sarkozy avait bien commencé. Il s’agissait, affirmait-il, de créer une nouvelle branche de la Sécurité sociale, un « 5ème risque » qui viendrait s’ajouter à la retraite, la famille, la santé et aux accidents du travail. « Une première fois depuis la Libération » soulignait le président.
Elle continuait plutôt mal car Sarkozy refusait d’emblée toute augmentation des cotisations sociales, toute augmentation de ce qu’il appelle les « prélèvements obligatoires ». Un concept forgé de toutes pièces par les néolibéraux et qui n’a de sens que pour ces derniers et les intérêts qu’ils défendent. Qui, à par eux, en effet, souhaiterait que sa retraite ou ses dépenses de santé soient financées par des prélèvements facultatifs et donc aléatoires ?
L’augmentation de la CSG et des cotisations sociales patronales étant exclue, il ne resterait plus que trois solutions. Faire payer les familles. Permettre à la Sécurité de récupérer les sommes avancées sur les successions des personnes dépendantes. Avoir recours aux assurances privées.
Mais toutes les familles ne pourront pas payer. Beaucoup de successions ne rapporteront rien et de nombreuses personnes ne pourront s’acquitter des primes d’assurance. Il faudra donc faire appel à un financement public pour les plus démunis. Plusieurs députés UMP ont déjà proposé une nouvelle « journée de solidarité », un nouveau lundi de Pentecôte travaillé mais non payé, ce qui reviendrait à faire financer la part publique du financement de la dépendance par les seuls salariés.
L’intervention de Sarkozy se terminait très mal car il ne résistait pas au désir de marquer sa préférence pour le recours aux assurances privées. La dépendance des personnes âgées, affirmait-il, est « le plus souvent un risque assurable qui peut être couvert en partie par des produits financiers innovants ». « Innovants » signifie, dans le langage codé des néolibéraux, qu’une incitation fiscale viendrait encourager la souscription d’une assurance privée. Visiblement, le déficit budgétaire et la dette publique ne pèsent plus très lourd aux yeux de la droite quand il s’agit d’accroître les profits de la banque-assurance.
Cette piste a été largement reprise par le rapport que la députée UMP Valérie Rosso-Debord vient de présenter au Parlement et qui propose de rendre obligatoire, dès l’âge de 50 ans, la souscription d’une assurance perte d’autonomie auprès de sociétés d’assurances ou de mutuelles.
C’est aux deux bouts de la chaîne, d’ailleurs, que les capitaux privés veulent recueillir le pactole de ce qu’elles appellent, avec cette belle absence de cynisme qui est leur trait distinctif, « l’or gris ». Depuis un certain temps déjà, en effet, le secteur privé met la main sur une part croissante de l’accueil en maison de retraites. Selon la Fédération hospitalière de France (FHF), entre 2003 et 2007 les places dans les établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes « ont été créées à 61 % par des établissements privés ». Le refus de créer suffisamment de places dans le secteur public pour répondre aux besoins sociaux fait le jeu des intérêts privés alors que les sommes restant à la charge des personnes accueillies s’élèvent, en moyenne, à 1 430 euros par mois dans le secteur public et à 2 007 euros dans le secteur privé. Partout, sous l’impact de la concurrence, les ratios d’encadrement minimal en personnel sont battus en brèche. Le bien-être des personnes âgées dépendantes n’est plus qu’un objectif secondaire, la rémunération des actionnaires devient la priorité et impose rapidement sa loi au secteur privé comme au secteur public.
La proposition de Nicolas Sarkozy est donc particulièrement inquiétante. D’autant plus inquiétante que risque de s’ouvrir la possibilité pour les assurances privées (sociétés d’assurances et mutuelles) de financer la dépendance dès le premier euro.
Une telle solution signifierait le début de la fin du monopole de la Sécurité sociale, sous prétexte d’instaurer une cinquième branche ! Elle constituerait un danger immédiat non seulement pour le financement de la dépendance mais aussi pour celui de l’Assurance maladie. Cela fait des années, en effet, que les assurances privées refusent d’être des « payeurs aveugles » et exigent de pouvoir financer les dépenses de santé dès le premier euro afin d’avoir les moyens de structurer leurs propres réseaux de soins, avec leurs médecins, leurs kinés, leurs cliniques, leurs centres d’imagerie médicale, leurs propres critères de remboursement et de prise en charge…
Un aperçu, même rapide, de l’évolution du système des Health Maintenance Organizations (HMO), des réseaux de soins mis en place aux États-Unis par les compagnies d’assurance devrait pourtant nous vacciner à tout jamais contre une telle catastrophe.
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