Salaires, le compte n’y est pas
L’Humanité de ce lundi met en lumière les conflits sociaux qui se multiplient
sur le niveau des salaires. Des luttes qui mettent à mal le dictat de
l’austérité et de la rigueur budgétaire.
L’édito de Maurice Ulrich :
Pour nombre de commentateurs,
la cause est entendue et les attentes sociales
sont à ce point solubles dans les résultats de la séquence électorale majeure
que nous venons
de vivre qu’elles auraient disparu. En somme, ce qui a permis
le succès de la gauche n’aurait plus lieu d’être et il n’y aurait rien de plus urgent que de prendre
le tournant de la rigueur en désertant, si l’on peut dire, le champ de bataille, toutes armes bas,
avant même d’avoir livré combat. De ce point de vue, les 2 % de « pichenette » évoqués
sur le Smic sont bel et bien de nature à donner raison à ceux qui, à droite et au Medef, comme l’avare de Molière, ne font que
répéter « ma cassette, ma cassette », au motif fallacieux que 23 euros par mois mettraient en péril les entreprises de France
en dépit des multiples allégements de charges qui leur ont déjà été consentis. Les mêmes seraient mieux inspirés de s’élever
contre la pression, sans aucune commune mesure, que font peser sur les PME les grands donneurs d’ordres du CAC 40
et autres, en exerçant sur elles une pression constante sur les marges, les prix, la productivité.
Mais là-dessus, ils ne disent
rien. Voyant qui ils défendent, on peut dire qui ils sont.
Travailleurs au RSA
Le compte n’y est pas, loin s’en faut.
Et pour le dire clairement, des millions d’hommes et de femmes de gauche, dont les quatre
millions qui ont voté au premier tour pour le Front de gauche mais pas seulement, attendent autre chose. Les quelques luttes
en cours pour les salaires que nous évoquons ci-contre en témoignent. Les salariés de Camaïeu demandent 100 euros par mois,
fiches de paye à l’appui alors même que nombre d’entre eux, comme on l’a appris ces derniers jours,
sont amenés
à toucher
ou à solliciter
un complément du RSA. Un comble, alors même qu’ils travaillent, que de devoir en appeler à l’aide de l’État.
Un scandale quand une entreprise en arrive à parier cyniquement sur
la solidarité nationale pour suppléer à la fiche de paye !
Aux Galeries Lafayette, c’est de 200 euros de plus par mois qu’il s’agit. Et combien d’attentes à ce niveau dans des milliers
d’entreprises ? En d’autres termes, la question n’est pas de savoir comment ces entreprises peuvent
faire pour augmenter le Smic,
mais comment font
des millions de salariés pour vivre avec les salaires qui sont les leurs aujourd’hui.
Rigueur pour les plus modestes
Dans nombre de milieux, qui veulent que
la victoire de la gauche ne soit qu’un changement d’équipe pour une même politique
économique,
la rigueur (pour les plus modestes) est érigée en dogme. Mais la réalité, c’est qu’un pays de bas salaires, comme
la France le devient, est un pays qui s’appauvrit.
C’est bien la peine, comme le font chaque mois
les économistes, de surveiller
comme le lait sur le feu les indices de la consommation des ménages, pour faire ensuite comme si cela n’avait aucun rapport
avec les politiques salariales.
À Rome en fin de semaine, François Hollande semblait assez satisfait d’avoir pu parler croissance. Hier, dans une interview
au Journal du dimanche, Bernard Cazeneuve, le ministre délégué aux Affaires européennes, rejetait « l’austérité à perpétuité ». Soit,
mais faudrait-il alors accepter l’austérité maintenant ? La croissance ne se décrète pas, et il ne s’agit pas davantage, comme
Nicolas Sarkozy prétendait le faire, d’aller « la chercher avec les dents », avec les résultats que l’on sait. La croissance ça commence
avec ceux dont l’argent ne va pas à la spéculation, mais irrigue immédiatement l’économie réelle. La croissance,
elle est au bas
de la fiche de paye et c’est la pierre
de touche d’une politique de gauche, pour la justice,
et pour une autre dynamique.
–> A lire aussi dans notre édition de ce lundi:
- Un grand ras-le-bol, des doléances raisonnées : après des années de diète, le gouvernement peut donner
l’exemple en décidant, ce mardi, de donner un réel coup de pouce au Smic. Une mesure de justice sociale, mais aussi
une façon de répondre à la crise, en grande partie provoquée par la politique d’austérité
- « Pas question d’une pichenette de 2%« , Pierre Laurent, secrétaire national du PCF
- L’état de grâce fini pour Hollande et le gouvernement, la lutte continue
- « Augmenter les salaires, une réponse à la crise« , le point de vue de Pascal Debay, membre de la commission exécutive
de la CGT
–> La carte des mouvements sociaux de l’Humanité.fr
→ Communiqué du PCF