INTERVIEW
Par : Communistes (journal)
Mis en ligne : 3 septembre
Le gouvernement entend privatiser La Poste, il en a réaffirmé cet été son intention. Comment s’organise la riposte ? Que disent les communistes ? Entretien avec Danièle Lebail, chargée des « Services publics » au Comité exécutif du PCF.
Entretien dans « Communistes » N° 360 http://www.pcf.fr/IMG/pdf/360_Commu… avec Danièle Lebail, chargée des « Services publics » au Comité exécutif du PCF.
Communistes : Où en sont les projets du gouvernement sur la Poste ?
Danièle Lebail : Va venir à l’automne un projet de transformation de l’établissement public de la Poste en société anonyme. Il s’agit en fait de l’ouverture du capital à hauteur de 3 milliards d’euros pour « faire face », dit le pouvoir, à la « concurrence » en Europe à partir de 2011. Le projet remonte à 2008. Mis en difficulté, le gouvernement a dû le repousser à plusieurs reprises car il fait face à une vraie résistance dans la population et chez les élus, particulièrement les élus ruraux. Par ailleurs, la politique que mène La Poste depuis 2000 est néfaste : fermeture de bureaux, réduction de l’offre de service public, notamment dans les campagnes. Depuis 1997, elle n’embauche pratiquement plus de personnel à statut mais uniquement des contractuels ; aujourd’hui 43 % du personnel sont des contractuels…
En vérité, l’ouverture du capital, c’est la privatisation. On peut entendre que le service public de La Poste ait besoin d’argent, mais elle aurait très bien pu se transformer en établissement public et commercial de manière à ce que ce soit l’Etat qui finance. C’est un choix idéologique qui a été fait par le pouvoir. Cela s’inscrit aussi dans le cadre de la réduction des dépenses publiques : le gouvernement ne veut plus mettre de moyens sur les services publics.
Communistes : Les résistances à un tel projet sont pourtant nombreuses…
Danièle Lebail : En effet, il existe depuis longtemps de nombreux collectifs de défense de la Poste, un peu partout en France ; ici pour s’opposer à une fermeture de sites, ailleurs pour exiger que le bureau réponde aux besoins de la population (horaires, personnel…). Ces collectifs agissaient plutôt localement. Je pense notamment à la bataille engagée par nos camarades de Thionville. S’est mis en place un collectif national, représentatif, avec l’ensemble des syndicats et des partis de gauche, l’objectif étant de fédérer un peu toutes ces actions. Ce collectif a proposé d’organiser un référendum national contre la privatisation le samedi 3 octobre et demande à l’ensemble des mairies d’aider à cette consultation.
Nous sommes, PCF, ANECR, complètement engagés dans cette bataille, l’objectif étant que les mairies organisent partout un tel référendum. Je pense que même des mairies de droite, particulièrement dans les villages, peuvent y participer car la population est attachée au service public et les maires ruraux tiennent à leur Poste, souvent le dernier service public dans leur commune. D’ailleurs, l’Association des maires ruraux n’a pas approuvé ce projet. L’objectif est donc de réussir ce référendum, de faire en sorte que plusieurs millions de personnes se prononcent le 3 octobre, d’ouvrir pour ce qui nous concerne les mairies communistes, les mettre à la disposition des collectifs pour organiser ce vote. Là où les autorités refuseraient d’accueillir l’initiative, le référendum se ferait dans la rue, devant les bureaux de Poste, dans les quartiers populaires.
Communistes : On peut donc faire reculer le pouvoir ?
Danièle Lebail : Le gouvernement a déjà reculé sur ce dossier. A propos de la date, je l’ai dit, car il devait présenter ce projet plus tôt. Il a bougé aussi sur le texte. Au départ, l’ouverture du capital devait se faire avec des capitaux privés. Face aux oppositions, il propose à présent que l’ouverture soit simplement faite au public (Caisse de dépôts, entreprises publiques…). Sur le fond, cela ne change rien, on sait ce que signifie une transformation en SA (voir France Telecom ou EDF) ; l’argument donc n’est pas recevable mais il peut séduire ici ou là et il va falloir donc mener débat. J’ajoute que l’ouverture à la concurrence prônée par l’Union européenne n’implique nullement privatisation du service postal.
Bref, le pouvoir a déjà reculé, on peut encore le faire reculer.
L’objectif est qu’il abandonne ce projet.
Propos recueillis par Gérard Streiff