30 juin 2011 – Glop Lerouge, Secrétaire de Section
Austérité en Grèce : le bon plan des vautours !
« Le Grec ayant chanté tout l’été, il se trouva fort
dépourvu quand la bise fut venue.
Pas un seul petit morceau de mouche ou de vermisseau,
il alla crier famine chez l’Allemagne sa voisine,
la priant de lui prêter quelque grain pour subsister
jusqu’à la saison nouvelle : ‘Je vous paierai, lui dit-il,
avant l’août, foi de Tantale, intérêt et principal’.
La Merkel n’est pas prêteuse ; c’est là son moindre défaut : que faisiez-vous au temps chaud ? Dit-elle à cet
emprunteur. –Nuit et jour à tout venant, je chantais, ne vous déplaise. –Vous chantiez ? J’en suis fort aise.
Eh bien ! Dansez maintenant ».
Cette charmante parabole, on nous la file en boucle depuis des mois. Les Grecs, eux, ont tendance à ne pas
trouver cela très drôle, et s’ils commencent à danser le sirtaki dans les rues d’Athènes, c’est au rythme des
coups de lattes. Pourtant, d’après l’OCDE (qui n’est pas exactement une section du PCF), les Grecs travaillent
beaucoup plus que les Allemands. Que s’est-il donc passé dans ce pays où les gens ont travaillé plus pour
gagner moins ?
Il était une fois tout un tas de banquiers et autres financiers qui prêtaient à des gens fauchés des grosses
sommes pour payer des maisons trop chères. Ils disaient aux emprunteurs de ne pas s’en faire car le prix
des maisons continuerait de monter, toujours plus haut, et qu’ils pourraient donc revendre leur maison pour
rembourser l’emprunt en cas de besoin. Avec ce super-système, les banquiers se faisaient pas mal de fric,
de quoi acheter plein de mouches et de vermisseaux. Il arriva cependant que, à force de payer les maisons
trop cher, plus personne ne pouvait les acheter… du coup les prix des maisons ont commencé à baisser
(aux EÉtats-Unis), et les gens qui ne pouvaient pas payer les intérêts ne pouvaient pas non plus revendre
les maisons pour rembourser les prêts ! Patatras ! C’est la « crise des subprimes », et les financiers étaient
sur le point de finir à poils, comme l’État grec…
Alors les États se sont dit que si les financiers trinquaient ce ne serait pas chouette. Ils ont donc mis la main
au larfeuille (qui est d’ailleurs dans nos poches à nous, mais passons…) pour « sauver » les financiers.
Résultat : les dépenses des États ont augmenté et la récession économique provoquée par la crise financière
a réduit les entrées fiscales. Les États ont donc pris sur eux (c’est-à-dire sur nous) les conséquences de la
spéculation sur le crédit immobilier ricain. Du coup, les banquiers ont tenu un raisonnement imparable :
puisque les États se sont endettés à cause de nous, leurs comptes ne sont pas sains, ils nous font donc courir
un risque à nous, les prêteurs, et il faut par conséquent qu’ils nous payent plus d’intérêts sur l’argent que nous
leurs prêtons… C’est ce qui est arrivé à la Grèce. Bon, mais puisque l’Etat paye plus d’intérêts aux banques,
sa situation financière continue de s’aggraver, et il faut donc qu’il paye encore plus d’intérêts car sa dette est
de plus en plus risquée… Pour payer les intérêts grandissants, il faut que l’Etat paye moins les fonctionnaires
et brade au privé (c’est-à-dire aux banques…) les services publics : c’est le « plan d’austérité ». Et on a d’ailleurs
raison de l’appeler comme ça : c’est l’austérité pour le peuple grec, et un bon plan pour les banquiers.
Qui y gagne dans tout ça ? Les spéculateurs, c’est-à-dire les banques, ainsi qu’un nouveau personnage :
l’État-spéculateur ! Et oui, car l’Allemagne a tenu le raisonnement suivant : si les banquiers se font si facilement
du pognon sur le dos des Grecs, pourquoi ne ferais-je pas la même chose ? Je ne suis pas plus bête ! Et du coup
l’Allemagne est devenue prêteuse, et avec du talent : elle a emprunté à un faible taux sur les marchés du pognon
qu’elle a prêté au taux fort à la Grèce ! Mais puisque l’Allemagne a de l’éthique, la marge spéculative qu’elle s’est
accordée est un peu moins importante que celle pratiquée par les banques :
on a des valeurs, quand on est une « grande démocratie européenne » !
Et que se passerait-il si les Grecs envoyaient balader tous ces vautours et autres oiseaux de mauvais augure, et
refusaient le brader leur société ? Rien du tout : la Banque centrale européenne serait obligée de faire ce qu’elle
aurait dû faire dès le départ, et les créanciers de la Grèce accepteraient de négocier de peur de paumer tout leur
pactole. Évidemment, les banques (y compris l’Allemagne) préfèrent un bon gros plan d’austérité…