Ce mercredi dans l’Humanité :
le douloureux exode des Maliens vers le Niger
Plus de 12 000 personnes ont quitté le nord du Mali
et se sont réfugiées à Niamey, dans la capitale
nigérienne, pour fuir les exactions commises
par des groupes islamistes qui se sont installés
dans leur région.
Reportage de notre envoyée spéciale.
Pour Maurice Ulrich, qui signe l’édito du jour :
« On peut s’interroger sur la lecture que fait la France
de la résolution du Conseil de sécurité de l’ONU ».
Les témoignages que nous publions dressent un tableau
effarant de la situation au nord du Mali. Les groupes armés
qui ont pris le pouvoir violent, rançonnent, mutilent,
détruisent en se réclamant d’une caricature monstrueuse
de l’islam.
Comment ne pas comprendre ces jeunes Maliens contraints de fuir leur pays mais qui n’ont qu’une idée,
y retourner pour en finir, par les armes, avec cette barbarie. On comprend de même l’inquiétude et le sentiment
d’urgence absolue du député touareg Bajan Ag Hamatou, et particulièrement en ce qui concerne le recrutement
des jeunes Maliens, par force ou par corruption, par le Mujao (Mouvement pour l’unicité du djihad en Afrique
de l’Ouest).
Il faut mettre un terme à cette situation, dont on peut rappeler qu’elle est une des conséquences
de l’intervention franco-anglaise en Libye.
La résolution adoptée jeudi dernier par le Conseil de sécurité de l’ONU, à l’unanimité, valide le principe
de l’envoi d’une force africaine, baptisée Afisma, au nord du Mali, et émanant de la Cedeao (la Communauté
économique des États d’Afrique de l’Ouest). Mais, et ce n’est pas une figure de style, la même résolution
précise bien qu’il ne s’agit que d’une option en dernier recours. En revanche, elle insiste toujours sur la recherche
d’une solution politique, passant par des accords entre Bamako et les groupes islamistes ou touareg, désormais
en conflit entre eux, assortis de leur renoncement au terrorisme.
On peut trouver cette perspective insatisfaisante, mais on peut s’interroger sur la lecture par la France
et par la voix du ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian, de cette position du Conseil de sécurité,
dont la France fait pourtant partie. Dans une interview publiée par la Croix, ce dernier déclare non seulement
que l’intervention militaire pourrait avoir lieu dans les prochains mois, mais aussi que « pour l’instant, il n’y a pas
de solution politique ». En d’autres termes, le choix de la France semble fait, qui annule même, de fait, la recherche
de toute solution politique, quand bien même elle n’existerait pas « pour l’instant ».
Mais il y a plus. Car quoi que l’on ait dit, la France serait bel et bien partie prenante de l’opération militaire,
au-delà d’un simple rôle de conseil et de coordination. 400 hommes des forces spéciales françaises viendraient
s’ajouter aux 3 300 hommes annoncés de la force africaine. C’est dire que se rejoue ici un scénario déjà éprouvé
où la France, sous couvert de l’ONU, entend gérer à sa main les affaires africaines.
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