Le PCF choisit l’unité des voix anti-austérité
Sébastien Crépel – 14 avril 2014
La direction communiste a adopté vendredi la proposition d’accord
du Front de gauche aux élections européennes. Un vote qui sera suivi
d ‘une consultation des communistes, d’ici à la fin du mois.
Sans prendre le temps de souffler, les communistes passent d’une campagne électorale à l‘autre, avec les élections européennes du 25 mai désormais en ligne de mire. Mais non sans prendre le temps de l’analyse du résultat des municipales et la mesure de la gravité de la situation politique dont il témoigne. C’est ce à quoi s’est attelée leur direction nationale, vendredi, en adoptant la proposition d’accord du Front de gauche de répartition des têtes de listes et de leurs suivants aux européennes, par 77 voix contre 18 et 9 abstentions. Un premier vote qui sera suivi d’une consultation des communistes, d’ici à la fin du mois, pour le valider et désigner les candidats qui porteront les couleurs du PCF sur les listes.
Sortis affaiblis, comme la gauche dans son ensemble, du scrutin municipal, mais non terrassé comme le Parti socialiste, les communistes n’ont « pas atteint (leur) objectif d’augmenter le nombre de mairies et d’élus communistes et Front de gauche », en dépit de gains non négligeables comme la direction des villes de Montreuil et Aubervilliers, renouant, « pour la première fois depuis 1995 », avec la conquête de « villes de plus de 75 000 habitants », a souligné le rapporteur, Pascal Savoldelli. Au final, avec 137 municipalités de plus de 3 500 habitants conservées, 12 gagnées et 47 perdues, le PCF « résiste alors que, dans le même temps, le PS connaît un Waterloo électoral ».
Une défaite socialiste dans laquelle les communistes ne trouvent aucun motif de se réjouir. Car non seulement « les grands vainqueurs de ces élections municipales sont l’UMP et l’UDI » flanqués d’un FN renforcé, confirmant « la porosité entre l’électorat de droite et l’électorat d’extrême droite », mais la réponse de François Hollande au message des urnes avive les inquiétudes des communistes, qui y voient la marque « d’une stratégie réfléchie et construite depuis plusieurs années pour redessiner la gauche française en général » en l’alignant sur les théories libérales. Avec, à la clé, une « uniformisation politique » qui met en danger l’idée même de « changement politique d’ampleur, d’alternative », laquelle se trouve aujourd’hui « profondément affaiblie, entachée », comme en témoigne le résultat des municipales.
C’est dans ce contexte de « recomposition réactionnaire » sur le plan des idées que la direction communiste était amenée à se prononcer sur la proposition d’accord entre les forces du Front de gauche aux élections européennes, conclu en début de semaine dernière. Dans le huis clos du Conseil national, tous les participants en sont convenus avec le rapporteur : cet accord n’est « pas le meilleur », constituant même « un recul » sur la proposition initialement présentée par le PCF à ses partenaires, « plus équilibrée et plus respectueuse de l’esprit du Front de gauche », selon Pascal Savoldelli.
Dans l’offre qu’elle avait validée à l’unanimité le 2 avril, la direction communiste proposait en effet de reconduire les quatre députés sortants de métropole en tête de liste de leurs circonscriptions (Jacky Hénin dans le Nord, Patrick Le Hyaric en Île-de-France, Jean-Luc Mélenchon dans le Sud-Ouest et l’élue sans parti Marie-Christine Vergiat dans le Sud-Est), et d’attribuer chacune des trois autres têtes de liste à une composante différente du rassemblement (Ensemble dans l’Ouest, le Parti de gauche dans l’Est, et le PCF dans le Centre). Mais l’accord n’a pu aboutir : « Nos partenaires le refusaient obstinément, mettant en danger la présence du Front de gauche dans ces élections et la réélection des sortants », a fait valoir Pascal Savoldelli. C’est donc dans l’esprit de ne pas se résigner « à la politique du pire » ? l’implosion du Front de gauche avec l’établissement de listes différentes, gâchant la possibilité d’un « bon résultat qui réveille l’espoir à gauche » ? que le PCF a « rouvert la possibilité d’un accord », en rediscutant de la proposition dans le Centre, dont la tête de liste devrait être finalement présentée par le PG. Quant à la candidature représentative de la composante citoyenne du Front de gauche incarnée par Marie-Christine Vergiat, elle n’a été soutenue que par le seul PCF, qui la désignera donc dans le Sud-Est au nom du Front de gauche, selon les termes de l’accord. Pour nombre de responsables communistes, cela illustre une divergence de conception du Front de gauche entre ses composantes et du rassemblement le plus large pour une autre politique à gauche qu’il doit permettre d’opérer.
En tout état de cause, le PCF a décidé d’approfondir sa réflexion sur ce sujet. Le Conseil national de la mi-juin qui suivra les européennes devrait proposer de convoquer une importante réunion nationale des communistes sur le sujet, préparée en amont en associant les adhérents à tous les niveaux de leur parti.