TRANSPARENCE
Les 1548 filiales des entreprises du CAC 40
dans les paradis fiscaux
par Olivier Petitjean – 18 février 2014
Paradis fiscaux : depuis la crise financière de 2008,
on ne cesse de nous promettre leur disparition,
mais ils semblent avoir la vie dure.
Les avancées réglementaires obtenues paraissent
minimales, quand elles ne sont pas remises en cause.
Aujourd’hui, l’attention du public se porte tout particulièrement vers les pratiques d’optimisation
fiscale des géants de l’internet comme Google ou Amazon, ou encore des chaînes de restauration
comme McDonald’s. Mais les entreprises françaises ne sont pas en reste.
La Revue Projet s’est penchée sur les filiales déclarées par les entreprises du CAC 40 dans les pays
considérés comme des paradis fiscaux. Une enquête riche d’enseignements.
L’intégralité de l’article, signé Jean Merckaert, est accessible ici.
Le chiffre de 1548 filiales est basé principalement sur les filiales déclarées par les entreprises du CAC40
dans leurs rapports annuels 2012, mises en regard de la liste des paradis fiscaux établie par le réseau militant
Tax Justice Network (l’article précise à chaque fois lesquels de ces pays figurent aussi sur les listes plus restreintes
établies par l’OCDE et l’État français).
Précision importante : l’information fournie par les entreprises est très loin d’être complète, de sorte que le chiffre
réel pourrait être bien supérieur à 1548 :
Les sociétés du CAC40 se distinguent par leur forte opacité concernant une information aussi basique
que l’implantation de leurs filiales. 23 des sociétés du CAC40 ne dressent, dans leur rapport annuel,
qu’une liste des « filiales principales ». Où sont celles jugées mineures ? La question reste entière.
France Télécom annonce 400 entités, mais n’en liste que 32. Danone publie les noms de 99 filiales
sur 252 annoncées, Capgemini : 124 sur 136, Legrand : 34 sur 157, Veolia Environnement : 106 sur 2728
et Vivendi : 57 sur 690. Quant à Total, la société annonce 883 entités mais ne donne les noms que de 179
d’entre elles (sans préciser, à l’instar des groupes Vinci et L’Oréal, les pays d’implantation). Parmi les filiales
passées sous silence, Total International Ltd (affréteur du pétrolier l’Erika), qui semble jouer un rôle pivot
dans l’achat et la revente de pétrole, est située aux Bermudes.
Ce manque de transparence amène évidemment à traiter avec prudence les résultats de notre enquête.
Le CAC40 publie les noms de 1548 filiales présentes dans les paradis fiscaux, soit 23 % de l’ensemble
de ses filiales étrangères. Le total serait probablement bien supérieur si l’on disposait d’une information
exhaustive.
Des pratiques qui concernent aussi les entreprises publiques (ou semi-publiques) :
La participation de l’État au capital n’est en rien gage de transparence. Si Safran, Renault et EDF
fournissent une liste exhaustive, en revanche EADS (Airbus Group depuis le 1er janvier 2014), GDF Suez
et France Télécom ne révèlent pas publiquement toutes leurs filiales. Pour cette liste incomplète,
on découvre 3 filiales paradisiaques pour France Télécom, 18 pour GDF Suez, 43 pour EADS.
EDF compte 11 filiales offshores, Safran 17 et Renault 19…
L’enquête note aussi que les entreprises françaises, contrairement à leurs homologues étrangères, tendent
à privilégier les « paradis fiscaux » proches que sont le Luxembourg, la Suisse, la Belgique ou les Pays-Bas
(seuls les deux premiers pays figurent sur la liste de l’OCDE) – où il n’est pas forcément aisé de distinguer
les filiales légitimes de celles qui ont été établies à des fins fiscales.
[Lire la suite sur l’Observatoire des multinationales]
Le CAC 40 toujours accro aux paradis fiscaux
À (re)lire sur notre blog : Enquête sur les rouages des paradis fiscaux
Pour échapper à l’impôt, l’imagination des géants du CAC 40 est toujours débordante
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