Écotaxe : « quand Benetton et Goldman Sachs collectent l’impôt français » (enquête Basta!)
Posté par communistefeigniesunblogfr le 2 novembre 2013
FISCALITÉ ÉCOLOGIQUE
Les dessous de l’écotaxe :
quand Benetton et Goldman Sachs collectent l’impôt français
En reportant l’entrée en vigueur de l’écotaxe pour les poids lourds,
le gouvernement Ayrault vient une nouvelle fois de capituler
face à des intérêts privés. Mais derrière cette taxe écologique
se cache une autre question, qui n’a jamais été soumise au débat
public : c’est la première fois que la collecte de l’impôt est confiée
à des entreprises privées. Un consortium emmené par Benetton,
Goldman Sachs, Thalès et SFR empochera 20% des recettes
de la taxe pour assurer son recouvrement. Du jamais vu ! Enquête.
Après six ans de reports et d’atermoiements, l’écotaxe poids lourds est devenue un sujet explosif. Et le gouvernement
n’en finit plus de s’empêtrer dans des reculades qui le décrédibilisent. Les critiques se focalisent sur le coût de la taxe
pour les transporteurs et les agriculteurs. Pourtant, l’essentiel est ailleurs : pour la première fois, la collecte d’un impôt
est confiée à des entreprises privées. L’État a fait le choix de déléguer le recouvrement de l’écotaxe à un prestataire,
par le biais d’un contrat de partenariat public-privé. Le produit de la perception de la taxe, estimée à 1 200 millions
d’euros par an, sera reversé à l’administration des douanes. Une première en matière de fiscalité ! Un système choisi
sous Sarkozy et mis en œuvre par un gouvernement socialiste et écologiste… L’écotaxe « s’appuie sur un mode
de recouvrement entièrement nouveau et automatisé. A bien des égards, c’est une taxe du XXIe siècle ! »,
s’enthousiasme la sénatrice UMP Marie-Hélène Des Esgaulx, dans un rapport remis à la Commission des finances
en février dernier.
« Un retour à la Ferme Générale de l’Ancien Régime ! », dénonçait la CGT, lorsque le gouvernement Fillon a validé
cette option, peu après le Grenelle de l’environnement. Cette externalisation entraine un surcoût pour le contribuable.
« L’écotaxe est incontestablement coûteuse », admet Marie-Hélène Des Esgaulx. Sur un total de 1,2 milliard d’euros
collectés, environ 280 millions d’euros sont consacrés à la rémunération du prestataire privé qui assure
le recouvrement. Soit 23 % [1] ! C’est la taxe la plus coûteuse jamais mise en place ! « A titre de comparaison,
ce pourcentage ne dépasse pas 1,2 % pour l’impôt sur le revenu », poursuit le rapport. « Le recouvrement d’un impôt
coûte souvent moins de 1% du montant de celui-ci, confirme Philippe Bock, secrétaire général du syndicat Solidaires
Douanes. « Pour les services des douanes, la masse salariale coûte un milliard d’euros, pour des rentrées fiscales
de 67 milliards d’euros. Le coût de recouvrement de l’écotaxe est complètement prohibitif ! » Cette taxe poids lourds,
« c’est service public minimum et profits maximum », résume le syndicat.
Benetton, Goldman Sachs, Thales et SFR, collecteurs d’impôt
« Le coût global du contrat de partenariat, bien qu’élevé, ne semble pas surestimé », conclut Marie-Hélène
Des Esgaulx devant la commission des Finances. Il est de toute façon bien tard pour s’en apercevoir. Le contrat
de partenariat a été signé en octobre 2011, pour une durée de 13 ans et 3 mois. L’État se trouve lié jusqu’en 2025,
sans qu’aucune étude n’ait été menée sur l’opportunité de confier cette mission au secteur privé. « Les Douanes
n’étaient pas capables de faire un tel montage technique », tranche le député UMP Hervé Mariton.
Au terme du contrat, l’ensemble du dispositif doit être remis à l’État.
Qui va toucher ces 280 millions par an (desquels sont déduits 50 millions de TVA) pour mettre en œuvre le dispositif
de recouvrement ? Un consortium d’entreprises baptisé Ecomouv’, mené par le groupe italien Autostrade. Celui-ci est
une filiale d’Atlantia, la société qui gère la plupart des autoroutes italiennes. Elle est détenue (à 48 %) par le fonds
d’investissement Sintonia, propriété de la famille Benetton [2]. La banque états-unienne Goldman Sachs est entrée
au capital de ce fonds en 2008. Autostrade, qui détient 70 % d’Ecomouv’, s’est allié avec les groupes français Thales,
SNCF, SFR et Steria, une entreprise qui vend des services informatiques aux entreprises.
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