Monique et Michel Pinçon-Charlot :
« La classe dominante use aussi d’une violence idéologique »
Fête de l’Humanité.
Deux ans après la parution du Président des riches,
Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon reviennent
sur le devant de la scène avec La Violence des riches.
Une plongée dans l’univers d’une classe dominante
dont les instruments de pouvoir, économiques,
financiers, culturels, médiatiques et politiques,
déstabilisent
de plus en plus notre démocratie
au détriment du peuple. Ils sont ce samedi les invités des Amis de l’Humanité à La Courneuve.
Après plusieurs plongées au cœur de l’oligarchie française, vous avez décidé dans votre dernier
livre de décrypter la violence que la classe dominante exerce sur le peuple. Comment se traduit
cette violence ?
Monique Pinçon-Charlot. De plusieurs manières… Il y a d’abord la violence économique, dans sa version
néolibérale, avec une finance spéculative qui prend le pas sur la production industrielle. Les exemples
d’entreprises françaises comme Peugeot, Arcelor et bien d’autres, licenciant à tour de bras malgré
des bénéfices énormes sont légion. C’est l’exemple immédiat de cette violence exercée par la confrérie
des grandes familles !
Il y a ensuite la violence politique avec le mensonge d’État comme technique assumée. Le président
Hollande et son gouvernement ont beaucoup trahi leurs promesses de campagne et les valeurs socialistes.
C’est une violence terrible que le mensonge politique. La classe dominante use aussi d’une violence idéologique
puisqu’il s’agit de faire croire que le néolibéralisme est naturel. Que les marchés sont comme la lune qui brille
ou les prés qui verdoient. Pour ce faire, cette classe très consciente d’elle-même utilise une autre forme
de violence : la violence linguistique. Ici, il s’agit de manipuler le langage pour corrompre la pensée.
Toutes ces violences forment au final une sorte de feu d’artifice qui aboutit chez les classes moyennes
et populaires à un fatalisme mortifère avec le sentiment qu’il est impossible de changer les choses.
Et c’est ça le plus terrible.
Vous parlez de mensonge d’État comme violence politique.
Le président Hollande continue à mener une politique
dans la continuité de celle de son prédécesseur. N’est-il pas
finalement lui aussi un « président des riches », comme le titrait
votre précédent ouvrage faisant référence au quinquennat
de Sarkozy ?
Michel Pinçon. Une des violences les plus profondes, c’est la perte
d’adhésion des couches populaires au discours politique. On peut
parler aujourd’hui de trahison politique, c’est vrai.
Mais le fait est que, dès 1985, François
Hollande, jeune socialiste maître de conférences à l’université,
cosignait un livre intitulé La gauche qui bouge, qui correspond point par point à son programme actuel
basé sur l’idée qu’il faut faire des économies dans un seul système possible : le capitalisme. Expliquant
au passage que cette politique libérale était la seule chance pour la gauche de succéder à la droite.
Or avec un tel point de vue, il ne peut y avoir de vraie opposition.
« L’alternative, telle que les principaux dirigeants du PS la conçoivent, c’est fini »
Le changement, ce n’est donc pas
pour maintenant ?
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