Le capitalisme fonctionne à l’égoïsme (André Comte-Sponville)
Posté par communistefeigniesunblogfr le 29 avril 2013
l’Humanité des débats CAPITALISME
Le capitalisme fonctionne à l’égoïsme
c’est pourquoi il fonctionne si fort
Par André Comte-Sponville, philosophe, auteur de l’ouvrage
« Le capitalisme est-il moral ? » (éd. Albin Michel, 2009, 284 pages, 17 euros).
Le capitalisme n’est ni moral ni immoral, il est amoral. Pourquoi ?
Essentiellement pour deux raisons. La première, c’est que pour être
moral ou immoral, il faut être un sujet, une personne, ou bien résulter
d’une décision individuelle. Un système impersonnel, « sans sujet, ni fin »,
comme disait Althusser, et que personne n’a inventé, ne peut être
ni moral ni immoral. Marx avait raison de comparer l’économie, au moins
de ce point de vue, aux sciences de la nature.
Souvenons-nous de la préface à la première édition du Capital : « Mon point de vue, d’après lequel
le développement de la formation économique de la société est assimilable à la marche de la nature
et à son histoire, peut moins que tout autre rendre l’individu responsable de rapports dont il reste
socialement la créature, quoi qu’il puisse faire pour s’en dégager. » Ce n’est pas la volonté des hommes
qui décide de l’infrastructure économique, c’est l’infrastructure économique qui détermine
– en dernière instance – les volontés des humains, lesquelles s’opposent tant et si bien que
« ce que veut chaque individu est empêché par chaque autre », au point que « ce qui s’en dégage est
quelque chose que personne n’a voulu » (Engels, lettre à Joseph Bloch, du 21 septembre 1890).
Bref, le capitalisme, comme tout mode de production, se constitue et avance « de façon inconsciente et aveugle »
(l’expression est d’Engels, dans la même lettre). Comment serait-il moral ou immoral ?
Soit, me dira-t-on : le capitalisme est un système
impersonnel, mais dans ce système, il y a des individus
qui le mettent en œuvre. En effet. C’est ma deuxième
raison de le trouver amoral :
non plus du fait de son objectivité « sans sujet, ni fin »,
mais par les motivations individuelles qu’il met en jeu.
Le capitalisme, que je sache, ne fonctionne pas
à la vertu, à la générosité ou au désintéressement !
Il fonctionne, tout au contraire, à l’intérêt, personnel
ou familial. Disons le mot : le capitalisme fonctionne
à l’égoïsme.
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