Entretien avec Thomas Coutrot, co-président d’Attac
« La poursuite des politiques d’austérité mène inéluctablement
à l’éclatement de l’UE »
Thomas Coutrot, co-président d’Attac et membre de la fondation Copernic
et des économistes atterrés, dresse un tableau pessimiste mais lucide
de l’avenir de l’Europe, au lendemain de la rencontre entre Angela Merkel,
François Hollande et le Premier ministre grec Antonis Samaras.
La chancelière allemande, Angela Merkel, puis le Président de la République François
Hollande ont rencontré l’un après l’autre Antonis Samaras, le Premier ministre grec.
Ils ont refusé le délai supplémentaire qu’il réclamait. Quel sens donner à cette décision ?
Thomas Coutrot : C’est clair : le gouvernement français partage les objectifs et la politique
du gouvernement allemand. Il n’y a pas de divergence entre les deux. Malheureusement,
il n’y a aucune d’ambigüité sur le sujet. Il s’agit de pousser la Grèce dans ses derniers retranchements. Même le gouvernement
grec s’est fait élire en promettant à sa population une renégociation du mémorandum, la réaction des dirigeants français et
allemands est extrêmement claire : il n’est pas question de renégocier quoi que ce soit de ce mémorandum.
Cela signifie-t-il que la France et l’Allemagne seraient prêtes à lâcher la Grèce à tel point qu’elle sorte de la zone euro ?
Il y a peut-être un jeu tactique de Hollande de retarder la manifestation d’une éventuelle divergence sur ce sujet de l’exclusion
de la Grèce de la zone euro. Mais s’il y a jeu tactique, le moins que l’on puisse dire est qu’il est maladroit et sans espoir car
ce n’est pas à la dernière minute, au moment où se posera la question de la nécessité d’exclure ou non la Grèce de la zone
euro, que l’on pourra commencer à mettre les divergences sur la table. Si l’on ne met pas les éventuelles différences tout de
suite sur la table, il sera trop tard lorsque la décision sera à prendre en urgence.
Personne, pourtant, ne mesure les conséquences d’une sortie d’un pays de la zone euro ? On pourrait imaginer
qu’ensuite l’Espagne, le Portugal se retrouvent dans la même situation…
C’est plus que probable. Ce qui amène la Grèce dans une situation ingérable, du point de vue macro-économique, puisque
exactement les mêmes mécanismes sont à l’œuvre en Espagne et au Portugal, mais aussi en Italie et en France. C’est donc
un engrenage, une question de temps, mais l’écart de compétitivité entre l’Allemagne et les autres pays de la zone euro est tel
que s’il n’y a pas une résorption rapide de cette écart de productivité par des politiques coopératives en Europe, la zone euro
éclatera.
Personne n’est prêt à mener cette politique ! Les peuples européens sont-ils condamnés à vivre dans une Europe
de l’austérité ?
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