Rio+20 : La marchandisation de la nature
Posté par communistefeigniesunblogfr le 19 juin 2012
NÉOLIBÉRALISME VERT
Rio+20 : comment multinationales et marchés financiers comptent
s’accaparer la nature
Par Sophie Chapelle
Un nouveau sommet des Nations unies sur le développement
durable s’ouvre à Rio le 20 juin (Rio+20).
Au programme : la mise en place d’une « économie verte »,
présentée comme une solution à l’épuisement des ressources
naturelles et au réchauffement climatique. Ou comment les tenants d’un néolibéralisme vert,
les grands groupes privés et les marchés financiers cherchent à s’approprier les biens communs :
eau, forêts, biodiversité ou cycle du carbone… Une entreprise prométhéenne pour transformer
la nature en bulle spéculative.
Vingt ans après le sommet de Rio de 1992, qui avait jeté les bases du développement
durable, la conférence qui s’ouvre au Brésil le 20 juin sera placée sous le signe
de « l’économie verte ». Si les attentes sont faibles en termes de résultats concrets,
cette conférence dite « Rio+20 » sera le théâtre d’une bataille idéologique cruciale.
« Le concept de développement durable exprimait un compromis entre les exigences
écologiques de durabilité et celles du développement, rappelle l’économiste Geneviève Azam,
coauteure de l’ouvrage La nature n’a pas de prix. Même si ce compromis s’est avéré
insoutenable, il devait toutefois engager les sphères économiques, sociales et politiques. »
Le discours dominant sur l’économie verte soumet au contraire les choix sociaux, écologiques
et politiques aux logiques économiques. « Il exprime un renoncement final à placer
la justice sociale et la durabilité au-dessus des logiques économiques de rentabilité. »
Du capitalisme vert au néolibéralisme vert ?
Qu’entend-on exactement par « économie verte » ? Il existe autant de définitions que d’institutions… Dans son rapport
de février 2011, le Programme des Nations unies pour l’environnement (Pnue) la définit comme « une économie qui entraîne
une amélioration du bien-être humain et de l’équité sociale, tout en réduisant de manière significative les risques
environnementaux et la pénurie de ressources ». Cette économie serait donc « LA » solution à la crise globale que nous traversons.
Malgré l’échec cuisant d’une régulation des émissions de gaz à effet de serre par le marché (les marchés « carbone »), l’auteur
le plus influent du rapport du Pnue, Pavan Sukdhev, préconise une approche financière. Selon cette approche, seuls des instruments
marchands comme les marchés de droits échangeables (les droits à polluer), la compensation, les produits dérivés, sont efficaces
pour gérer les biens communs que sont l’eau, l’air, la terre, la biodiversité ou le climat. Le fait que Pavan Sukdhev soit mis
à la disposition du Pnue par la Deutsche Bank, peut expliquer l’orientation néolibérale du rapport…
Les financiers à la conquête du capital naturel
Ce capitalisme vert est déjà à l’œuvre. Agrocarburants, gaz et huiles de schiste, marchés du carbone, brevets sur le vivant,
libéralisation du commerce des biens et services environnementaux, accaparement des biens communs naturels, dessinent
une nouvelle phase du capitalisme. Sous Reagan déjà, on assiste à des droits de propriété sur l’atmosphère, et à partir de 1997,
à la mise en place de permis d’émissions de gaz à effet de serre sous Kyoto. « Mais il s’agit là encore de la phase artisanale
du capitalisme vert, précise Geneviève Azam. L’économie verte, en effet, est plus qu’un verdissement du capitalisme :
c’est la conquête du « capital naturel », son inclusion dans le cycle du capital, non pas seulement comme stock dans lequel puiser
sans limite, mais comme flux producteur de services. » Désormais, les flux deviennent plus importants que les ressources.
Après avoir marchandisé les éléments de la biodiversité, l’économie verte s’attaque donc aux processus, aux « services rendus ».
Il s’agit de quantifier financièrement les services rendus par la nature comme le filtrage de l’eau ou la capture du carbone. Objectifs ?
Créer par exemple un marché de crédits de biodiversité négociables que l’on pourra compenser, échanger ou vendre. Les grands
cycles écologiques du carbone, de l’eau, de la biodiversité pourraient désormais entrer dans des bilans comptables.
Remplacer le pétrole par la biomasse
« Pour le Pnue, assigner à la nature une valeur monétaire, un prix, serait la meilleure façon de la protéger ! », dénonce la Fédération
internationale des Amis de la Terre (FOEI) [1]. « Ce à quoi nous assistons n’est rien de moins que la naissance d’une vaste industrie
du vivant, résume le think tank canadien ETC Group [2]. Les entreprises ne se contentent plus de contrôler le matériel génétique
retrouvé dans les semences, les plantes, les animaux, les microorganismes et les humains ; elles veulent également contrôler
la capacité de reproduction de la planète. »
Source 2e image ajoutée : mouvementsansterre.wordpress.com
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