Le modèle allemand : les « oublis » de Sarkozy
- 20 % de travailleurs pauvres
- Pas de salaire minimum : minimum vital : 374 euros
- 40% des Allemands ont un salaire mensuel net inférieur à 1000 €
- 2, 5 millions de personnes travaillant pour moins de 5 euros de l’heure
- 1 emploi sur 10 est un « minijob »:
Salaire à moins de 400 euros par mois
Aucune couverture sociale
Aucun droit à la retraite ou aux allocations chômage
- Plus de 660 000 retraités doivent travailler à temps partiel pour compléter leur pension
- L’espérance de vie des plus pauvres a diminué de 2 ans entre 2001 et 2010
- Une hausse des inégalités qui a peu d’équivalents en Europe
A lire :
- Un modèle qui ne fait guère envie
Arnaud Lechevalier – Alternatives Economiques n° 300 – mars 2011
Extraits :
Croissance faible, inégalités et précarité qui explosent, investissement en panne,
démographie catastrophique…, l’évolution récente de l’Allemagne ne ressemble pas
à une success story à copier d’urgence.
L’économie allemande possède une industrie puissante, elle exporte beaucoup et a connu une reprise plus rapide que les autres pays européens en 2010 (après cependant une chute plus marquée en 2009). Du coup, elle est présentée un peu partout comme LE modèle à imiter. Pourtant, si on y regarde de plus près, ses performances n’ont vraiment rien eu d’exceptionnel ces quinze dernières années et ses perspectives d’avenir sont contrastées. Quant à l’évolution du modèle social allemand, elle est inquiétante et n’incite guère à suivre le même chemin. D’autant que la politique mise en oeuvre en Allemagne a été dommageable pour le reste de la zone euro.
[...]
… Une politique de maîtrise drastique des dépenses publiques et sociales a été mise en place, accompagnée, dans le cadre des quatre lois dites Hartz votées entre 2002 et 2004, par un changement de l’organisation et des conditions de l’indemnisation du chômage et par la promotion de formes d’emploi atypiques. Le pourcentage des chômeurs indemnisés a chuté de 80 % en 1995 à 35 % en 2008 et toutes les personnes au chômage depuis plus d’un an ont basculé vers l’aide sociale. Parallèlement, plusieurs réformes du financement de la protection sociale (taxe écologique puis hausse de la TVA) ont été mises en oeuvre afin de réduire le coût du travail.
Dans le même temps, les entreprises allemandes ont développé des stratégies de délocalisation, particulièrement dans les pays d’Europe centrale et orientale, pour réduire leurs coûts. Les exportations allemandes contiennent ainsi une part croissante de composants importés. Cela n’a cependant pas nui à la valeur ajoutée produite sur le sol allemand, mais a pesé sur l’emploi peu qualifié et les négociations salariales.
Emploi et protection sociale sacrifiés
[...]
En Allemagne, un emploi sur trois n’est désormais ni à plein temps ni à durée indéterminée et un sur dix est un minijob, des emplois à moins de 400 euros par mois non assujettis aux cotisations sociales salariées. Du coup, le nombre d’emplois qui contribuent au financement de la protection sociale reste aujourd’hui encore inférieur de deux millions à ce qu’il était en… 1991. Parallèlement, le pourcentage des emplois à bas salaires (*) a progressé de 6 points au cours des dix dernières années et se situe désormais au même niveau que dans les pays anglo-saxons. 2,5 millions de personnes travaillent pour moins de 5 euros de l’heure dans un pays qui n’a pas de Smic (9 euros brut en France).
Cette évolution vient s’inscrire dans un contexte plus général d’érosion de la protection des salariés par les conventions collectives [1] : la part des salariés couverts a baissé de 76 % à 62 % en dix ans et ces conventions ne concernaient plus que 40 % des entreprises allemandes en 2008. De plus, les syndicats ont dû concéder de multiples dérogations aux conventions collectives de branche au niveau des entreprises (Öffnungsklausel). Seul le coeur des entreprises industrielles échappe en partie à ce délitement, comme l’a illustré la préservation de l’emploi dans l’industrie au coeur de la crise en 2008 et 2009.
Globalement, l’objectif de maximisation des taux d’emploi a conduit à un éclatement de la norme d’emploi en termes de statuts, de temps de travail et de rémunération. Il en est résulté une forte augmentation des inégalités salariales et plus généralement des inégalités de revenus après redistribution, en raison des politiques fiscales et sociales menées. Une hausse des inégalités qui n’a eu que peu d’équivalents : en Europe, selon les données d’Eurostat, il n’y a qu’en Roumanie et en Bulgarie qu’elles se sont davantage accrues au cours des années 2000 !
- Le modèle allemand est-il une réussite ?
par Frédéric Allary
Extrait :
3. Un modèle social qui souffre
Entre 2000 et 2010, la proportion de temps partiels en Allemagne a augmenté d’un tiers, alors qu’elle restait stable en France.
Sur cette période, l’Allemagne a créé 2 millions d’emplois à temps partiels (et peu à temps plein), tandis que la France en a créé 2 millions à temps plein (et très peu à temps partiel).
Désormais, avec un quart de ses salariés à temps partiel, l’Allemagne a une forte proportion de faibles revenus, ce qui pèse sur la consommation de ses ménages.
En outre, l’Allemagne n’a pas encore de salaire minimum. 20% des salariés y sont payés à un niveau inférieur au SMIC horaire français. Plus d’1 million d’Allemands touchent même moins de 5 € brut de l’heure et plus de 2 millions d’entre eux moins de 6 € brut de l’heure (Institut travail et qualification – Université Duisburg Essen).
Depuis la réforme Hartz IV, lancée par Schröder en 2004, la multiplication des petits horaires et des mini-jobs fait de l’Allemagne une puissance économique qui recule sur le plan social.
Le salaire mensuel net médian a perdu 7,4% en 10 ans. Aujourd’hui, 40% des Allemands ont un salaire mensuel net inférieur à 1000 € .
- Le coût des réformes Outre-Rhin
Par Frédéric Lemaître
Extrait :
LES « MINI-JOBS » FAVORISÉS
La première loi Hartz oblige les chômeurs à accepter un emploi moins rémunéré que leur allocation de chômage. S’ils sont célibataires et sans enfant, l’emploi peut leur être proposé partout en Allemagne.
La deuxième favorise les « mini-jobs » avec l’exonération des charges salariales pour les emplois payés moins de 400 euros mensuels. Une mesure qui touche plusieurs millions de personnes.
La troisième loi rend plus difficile l’accès à l’allocation de chômage (il faut avoir travaillé un an au cours des deux dernières années) et la durée de cette allocation est réduite à un an.
La quatrième a prévu de fusionner les indemnités sociales et les indemnités de chômage de longue durée, l’équivalent allemand des RMistes que sont les « Hartz IV ».
Outre les lois Hartz, l’ »Agenda 2010″ comportait trois grandes mesures. Sur les retraites, les cotisations ont été augmentées ; l’âge minimal de liquidation des droits pour les chômeurs a été progressivement relevé ; l’âge de la retraite a été reculé à 65 ans puis, en 2007, il a été encore repoussé, à 67 ans progressivement à partir de 2012.
L’avantage fiscal dont bénéficiaient les retraités est peu à peu supprimé, des plans de retraite par capitalisation aidés par l’Etat pour les plus modestes sont mis en place.
Dans le domaine de la santé, un forfait trimestriel de 10 euros lors des consultations médicales est à la charge de patients, les remboursements sont recentrés sur les pathologies lourdes, les soins dentaires sont sortis des domaines pris en charge. Les retraités sont mis à contribution pour l’assurance-maladie. (…)
[Lire l’article complet sur lemonde.fr/]
- Modèle allemand : Et moins longtemps la pauvreté durera
Extraits :
Une étude publiée récemment par le gouvernement fédéral allemand révèle que l’espérance de vie des citoyens les moins payés avait diminué de deux ans entre 2001 et 2010.
[...]
Selon le media suisse emploi.letemps.ch, l’espérance de vie des personnes aux revenus les plus faibles est passée de 77,5 ans en 2001 à 75,5 ans en 2010, diminuant de 2 ans.
« Dans les anciens länder d’Allemagne de l’Est, la chute de l’espérance de vie des petits revenus —ceux qui touchent moins des trois quarts du revenu moyen— est encore plus marquée : elle passe de 77,9 ans à 74,1 ans, sur la même période. »
Selon l’humanité du 13/12/2011 : « Les liens sont patents entre ce recul dûment enregistré de l’espérance de vie des plus pauvres et la formidable entreprise d’écrasement des coûts salariaux qu(ont constitués les réformes antisociales mises en œuvre par Gerhard Schröder puis par Angela Merkel .
Quand le recul de l’âge de départ à la retraite était justifié par l’allongement de l’espérance de vie…
Toujours selon le media suisse « Le spécialiste des retraites au sein du groupe parlementaire Die Linke, Matthias Birkwald, a souligné qu’en Allemagne « le recul de l’âge de la retraite à 67 ans avait été justifié par un allongement de l’espérance de vie », dans un communiqué. L’âge de la retraite va y passer graduellement de 65 à 67 ans, en vertu d’une réforme adoptée en 2007 par le gouvernement de coalition de l’époque qui rassemblait sociaux-démocrates et conservateurs. »
Partez plus tard, mourez plus tôt = moins de retraites à payer ?
« Selon M. Birkwald, ces chiffres signifient que l’augmentation de l’âge de la retraite « ne représente rien d’autre qu’un grand plan de réduction des retraites qui touche avant tout les plus faibles revenus et ceux qui occupent les emplois les plus pénibles ».
Quand l’UMP vante le modèle allemand…
[...]
Nul doute que l’UMP a de grands projets pour les plus pauvres : Leur éviter d’être pauvres trop longtemps tout en réduisant les déficits publics. Car, sans vouloir être cynique, en extrapolant la courbe (année-espérance de vie) de l’étude allemande sur les prochaines décennies, avec l’hypothèse :
- d’une réduction de l’espérance de vie de 2 ans tous les 10 ans
- d’un départ à l’âge de 67 ans
On peut craindre qu’à partir de 2046, un citoyen allemand de la frange des moins payés vivra en moyenne 6 mois après son départ en retraite et sera mort deux ans avant dés l’année 2055.
Et ce, sans prendre en compte la péniblité..
[Lire l’article complet sur agoravox.fr]
[L’article de l’Humanité cité ci-dessus.]
- LE MIRACLE ALLEMAND À QUEL PRIX ?
La compétitivité allemande : 20 % de travailleurs pauvres
Extraits
Un euro de l’heure
… La libéralisation du marché du travail, destinée à rendre l’Allemagne plus compétitive, a d’abord eu pour conséquence de reléguer les chômeurs de longue durée dans la pauvreté.
[...]
Depuis 2005, le demandeur d’emploi doit faire des démarches « positives » bimensuelles, et peut surtout être contraint d’accepter un emploi moins payé que le précédent, plus éloigné ou en-dessous de ses qualifications sous peine de perdre ses subsides.
On a également assisté à la prolifération de deux nouveaux types de contrats:
- Les Mini-Jobs: des contrats à temps partiel, payés 400 euros par mois, qui permettent aux employeurs d’être exonérés de charges mais prive ses bénéficiaires d’assurance maladie et travail. Ils n’ouvrent aucun droit à la retraite ou aux allocations chômage.
- Les 1 euro-jobs, ces fameux contrats payé un euro de l’heure : généralement pour des travaux d’intérêt public.
… entre 1999 et 2009, toutes les formes de travail atypiques se sont accrues d’au moins 20%.
(…) Ces formes de contrats sont également très répandus chez les retraités : 660 000 d’entre eux combinent leurs pensions à un Minijobs.
« Dumping salarial » pour rester compétitif
En mai 2011, les statistiques officielles faisaient désormais état de 5 millions de mini-jobs. (…)
Au niveau international, l’Allemagne se distingue comme une société à deux vitesses en ce qui concerne le marché du travail (…) En Allemagne, encore plus que dans les autres pays membres, les employés sans emploi fixe sont les principales victimes de la crise. ( OCDE – janvier 2010)
2 millions de salariés à moins de 6 € l’heure
… aucune loi fédérale ne fixe de salaire minimum (chaque branche d’activité dispose de sa propre grille de salaire, négociée avec les syndicats). Une situation quasi unique en Europe. Résultat, les travailleurs pauvres représentent près de 20 % des employés allemands.
… plus de 6,55 millions de personnes en Allemagne touchent moins de 10 euros brut de l’heure – soit 2,26 millions de plus en 10 ans. (…)
Par ailleurs, 2 millions d’employés gagnent moins de 6 euros de l’heure Outre-Rhin et, en ex-RDA, ils sont nombreux à vivre avec moins de 4 euros par heure, c’est-à-dire moins de 720 euros par mois pour un temps complet. (…)
Le « minimum vital digne » estimé à… 374 euros (…)
[Article complet sur fr.myeurop.info/]
Ces retraités allemands obligés de retourner au travail
Par Deborah Berlioz (Berlin)
Extraits :
Ils distribuent des journaux, rangent les étagères dans les supermarchés, font des sondages par téléphones… Plus de 660 000 retraités allemands doivent travailler à temps partiel pour compléter leur pension. Un nombre en hausse constante : la multiplication des mini-jobs et des faibles salaires donne nécessairement des retraites de misère.
[...]
Paupérisation
… ils [les retraités,ndlr] sont de plus en plus nombreux à faire partie de cette catégorie de population menacée de paupérisation. Ils n’étaient que 416 000 en 2000. Leur nombre a donc augmenté de plus de 58% en dix ans.
Baisse déguisée du niveau des prestations
Selon Ulrike Mascher, (…) : « Les prix ont augmenté dans beaucoup de domaines particulièrement importants pour les séniors, comme le chauffage ou la santé ». Cette inflation ne serait pas un souci si le niveau des pensions suivait. Mais c’est là que le bât blesse, il a plutôt tendance à diminuer.
Les pensions de l’assurance retraite allemande ont perdu 10% de leur valeur durant les dix dernières années,
précise la présidente de VdK. En cause: la hausse des mini-jobs, ou des emplois à très faible rémunération. Beaucoup de travailleurs ne réussissent ainsi pas à cotiser suffisamment pour s’assurer une retraite décente.
De plus, le gouvernement allemand a décidé en 2007 de relever l’âge légal de la retraite de 65 à 67 ans. Or l’âge effectif de départ à la retraite de ce côté du Rhin est de 62,1 ans pour les hommes et de 61 ans pour les femmes selon l’OCDE. Et le taux d’activité des personnes entre 50 et 65 ans n’est même pas de 70%. Une hausse de l’âge légal de départ ne revient donc ni plus ni moins qu’à une baisse déguisée du niveau des prestations.
[...]
Toujours pas de salaire minimum
[...]
Selon les experts, la paupérisation des séniors ne va cesser d’augmenter durant les vingt prochaines années…
[Article complet sur fr.myeurop.info/]
[Le miracle allemand/Dossier complet]