Christian Laval : « l’école est au centre des nouvelles luttes des classes »
Posté par communistefeigniesunblogfr le 25 octobre 2011
Source : humanite.fr/ - 28 septembre 2011
Christian Laval :
« l’école est au centre des nouvelles luttes des classes »
Co-auteur de
la Nouvelle École capitaliste (La Découverte, 2011),
ce sociologue, membre de l’Institut de recherches de la FSU,
décrypte les conséquences de la logique d’entreprise
appliquée, chaque année un peu plus, à l’éducation.
Vous expliquez dans votre dernier ouvrage La nouvelle école capitaliste que notre système scolaire
est aujourd’hui à un « tournant historique ». Lequel ?
Christian Laval. Au-delà des réformes connues du gouvernement Sarkozy, comme
la destruction des postes ou la suppression de la formation des enseignants,
l’école et l’université sont l’objet depuis une vingtaine d’années d’un changement
plus profond. Au gré d’une succession de mesures, parfois peu perceptibles,
se construit, brique après brique, un autre modèle éducatif que nous appelons
la nouvelle école capitaliste.
Ce modèle n’est, certes, pas encore entièrement réalisé, on peut encore le contenir et le combattre, mais
c’est une tendance bien réelle.
Qu’est-ce qui la caractérise ?
Christian Laval. Selon ce modèle, l’école a désormais une fonction qui se voudrait essentiellement, voire
exclusivement, économique. La connaissance, qu’elle soit élaborée par la recherche ou diffusée dans l’école,
est envisagée comme une valeur économique et intègre la logique dominante de l’accumulation du capital.
Comme cela se concrétise-t-il ?
Christiant Laval. L’aspect le plus visible est lorsque l’enseignement devient une affaire d’achat et de vente.
On le voit, par exemple, avec la montée de l’industrie du soutien scolaire ou le développement actuel de
différentes formes de coaching payant. On le voit également avec l’accroissement de la part du privé dans
le financement de l’école et l’université. Tout cela relève d’un phénomène de marchandisation. Mais il ne faut
pas s’arrêter-là. Moins visible mais plus fondamental, on s’aperçoit que la norme sociale du capitalisme tend
à devenir la règle de fonctionnement des systèmes d’enseignement qui sont régulés de plus en plus par
la concurrence. De fait, les politiques néolibérales importent dans le champ éducatif et au sein même du service
public les logiques propres au marché. Plus qu’à une marchandisation, on assiste donc à une « mise en marché »
des services publics d’enseignement, avec des écoles et des universités qui, même si elles restent publiques,
tendent à fonctionner comme des entreprises. L’exemple le plus concret est la loi LRU qui instaure de manière
délibérée une concurrence entre les universités. C’est également, dans le premier et le second degré,
l’assouplissement, voire la suppression, de la carte scolaire qui conduit aussi à une mise en concurrence
des établissements.
Quels sont les effets de cette mise en concurrence ?
Christian Laval. Elle a des effets considérables sur le fonctionnement des systèmes scolaires. Partout où elle
a été mise en place, comme en Angleterre, en Nouvelle-Zélande ou encore en Australie, elle aboutit à une
polarisation sociale et ethnique des établissements. Les études comparatives internationales sont, sur ce point,
sans ambiguïté. C’est donc en toute connaissance des conséquences que ces politiques ont été conduites dans
notre pays comme dans d’autres, et qu’elles ont été soutenues aussi bien par la droite que par la gauche
socialiste. Une unanimité qui dit bien à quel point la norme néolibérale a été imposée et intériorisée par tous
les gouvernements.
[Lire la suite sur : humanite.fr/]
Lire également :
sur liberation.fr/L’école condamnée à produire du capital humain
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