7 juillet 2011 – Glop Lerouge, Secrétaire de Section
35 heures : le retour du grand cirque
Copé (UMP) et Novelli (UMP) d’un côté, Xavier Bertrand
(UMP) de l’autre, débattent sur les 35 heures. L’enjeu est
de taille :
le candidat Sarkozy à l’élection de 2012 doit-il proposer la
suppression des 35 heures ? Les premiers disent « oui » ;
« non » rétorque le second… Le suspense est à son comble.
Sans déconner ! Devant une farce de cette facture, il faut
savoir s’incliner : chapeau les artistes !
Si, si, j’insiste :
à ce niveau-là, ça force l’admiration. Depuis 2002, à l’approche de chaque échéance électorale, l’UMP sort
un débat bidon sur les 35 heures. Et v’là-t’y pas que devant la galerie amusée des analystes de tous poils,
ça marche encore ! C’est comme au cirque, le coup du clown qui se casse la gueule : on peut le voir dix fois,
vingt fois, cent fois, on se bidonne toujours pareil.
Première question : qui est responsable de la réglementation du temps de travail en France ?
La « loi Aubry » sur les 35 heures a été adoptée en juin 1998 (Loi n°98-461). En vertu de ce texte,
le passage aux 35 heures est échelonné entre janvier 2000 et janvier 2002. On se demande qui est au
pouvoir en France de façon ininterrompue depuis juin 2002… Euh, tiens, c’est l’UMP. Conclusion : la gauche
a appliqué les 35 heures pendant six mois ; la droite pendant dix ans ! Si la réglementation sur le temps du
travail est effectivement un torchon, on sait à qui on doit dire merci !
Deuxième question : quelle est la durée de travail d’un salarié en France ?
Réponse : arrêtez de me poser des questions à la noix, vous n’avez pas compris que ça ne veut plus rien dire !
Bon, puisque vous insistez, je vais vous lire le Code du travail, le vrai, pas celui dont parlent les médias,
mais ça ne va pas vous faire plaisir. En cas de « circonstances exceptionnelles » la durée hebdomadaire peut
aller jusqu’à 60 heures, aujourd’hui, en France (12 heures par jour sur 5 jours, vous aviez fait les comptes).
En temps normal, en revanche, la durée maximale du travail est de 48 heures (art. L 3121-35). Sur douze
semaines consécutives, cependant, il ne faut pas dépasser une moyenne de 44 ou 46 heures, suivant les
branches (art. L 3121-36). Ça choque son monde, pas vrai ? Mais c’est ça la loi en France, et on vous parle
de 35 heures…
Troisième question : combien bossent vraiment les gens ?
Ah ben voilà, on y vient, enfin une question sensée : puisque la « durée légale » n’est pas la
« durée maximale » du travail, combien turbinent vraiment les travailleurs français ? Beh, on ne sait pas
ça non plus : ça dépend de qui fait les statistiques ! Selon les chiffres officiels, les français travaillent en
moyenne 41 heures par semaine, soit plus que les allemands, et la plupart des autres travailleurs de pays
« développés » (c’est vrai que les grecs travaillent encore plus pour encore moins, et on leur demande de
se serrer la ceinture…) ! L’arnaque est de taille : à 35 heures par semaine, les travailleurs
français bossent plus longtemps que les Allemands à 37,5 heures hebdo !
Avec les lois UMP, le temps est relatif ;ce qui explique d’ailleurs comment ses « ténors » arrivent à dire
35 heures d’âneries en cinq minutes (c’est un gain de productivité certain).
Quatrième question : mais comment est-ce possible ?
C’est tout simple. Confortablement installée sur son trône, l’UMP-Medef a une idée en or (pour les patrons) :
elle a laissé les mots « 35 heures » dans les textes, mais elle a décidé que la « durée légale du travail »
n’était plus le temps réel de travail, laissant ce dernier à la « négociation ». La durée légale du travail est
donc devenue simplement une façon de calculer le salaire des travailleurs : les premières 35 heures bossées
sont payées sur le salaire mensuel, les autres sont payées en heures supplémentaires. Quand on bosse
40 heures par semaine (soit moins que la moyenne), on est payé cinq heures en sup’. Vous comprenez mieux
l’arnaque ce coup-ci. Si on abandonne les 35 heures et on passe, mettons, à 38 heures, le copain qui trime
40 heures va continuer à travailler 40 heures. Sauf que, au lieu d’avoir 5 heures supplémentaires de payées,
il en aura deux. Il travaillera pareil pour gagner encore moins ! Et ce n’est que ça ! La manip’ de Copé et
Novelli, pilotée par le Medef, n’est que ça ! Rien à voir avec le temps du travail :
il s’agit « simplement » (enfin…) de payer encore moins les travailleurs, alors que les
français figurent déjà, selon l’OCDE, parmi les plus exploités d’Europe…
Cinquième question : puisqu’on a du temps libre, qu’est-ce qu’on attend ?