PCF Nord
Intervention en Lybie :
Intervention de Roland Muzeau à l’Assemblée Nationale
Déclaration suivie d’un débat sur l’intervention des forces armées en Lybie
Monsieur le Président, Messieurs les ministres, Mes chers collègues,
Quand dans tant d’autres pays voisins, un débat a eu lieu sur l’opportunité d’entrer en guerre avec la Lybie,
ici, dans notre belle démocratie, on ne donne que quelques minutes de temps de parole à la représentation
nationale pour s’exprimer. Que penser d’une telle parodie de consultation démocratique alors que notre
pays est déjà entré en guerre ?
23 mars 2011
Ce débat est néanmoins l’occasion pour nous d’exprimer à nouveau notre solidarité avec les peuples arabes en général, et avec le peuple libyen, en particulier, mus par un souffle de
libération, aussi profond que légitime. Cette solidarité avec le peuple libyen ne saurait pour autant annihiler tout esprit critique à l’endroit du comportement de notre propre pouvoir
exécutif, dont les choix diplomatiques sont illisibles, contradictoires, et aboutissent in fine à altérer notre crédibilité internationale.
Un déclin que semble signifier l’ultime épisode de l’entrée en guerre de la France contre la Libye dans le cadre de la résolution 1973 du Conseil de sécurité de l’ONU.
Au-delà de l’élan politico-médiatique de ces derniers jours, l’intervention militaire en Libye repose sur deux fictions.
L’Elysée et ses portes paroles, repris avec une certaine cécité par la majorité des médias, prétendent qu’il y aurait une unité de la communauté internationale pour soutenir les
bombardements en Libye. Au mieux il s’agit là d’une erreur d’analyse, au pire d’un mensonge, d’une manipulation. Permettez-nous, en effet, de souligner les méfiances et les
oppositions qui s’expriment autour de cette intervention militaire. Il suffirait de rappeler ici la position de certaines puissances mondiales comme l’Inde, la Chine et la Russie,
qui refusent de soutenir l’offensive militaire.
Mais l’attitude d’autres pays est plus significative encore.
Il y a d’abord l’Allemagne, 1ère puissance européenne, qui s’est abstenue sur la résolution lors du vote du Conseil de Sécurité. Son vice-chancelier et ministre fédéral des affaires
étrangère, résumait au Guardian sa position en ces termes : « Une solution militaire semble très simple mais elle ne l’est pas. C’est risqué et dangereux, les
conséquences peuvent être imprévisibles (…) Nous admirons la révolution tunisienne mais nous voulons que ces mouvements soient renforcés et
pas affaiblis (…) Examiner des alternatives à un engagement militaire, ce n’est pas ne rien faire. ».
En cela, l’Allemagne rejoint le Brésil, 1ère puissance sud-américaine, qui s’inquiète, par la voix de son ambassadrice à l’ONU du risque d’exacerber les tensions sur le terrain au
détriment des populations civiles que nous sommes engagés à protéger. Les Brésiliens insistent sur le caractère spontané des révolutions arabes et alertent sur le risque d’en
changer le récit, ce qui aurait de sérieuses répercussions pour la Libye et le reste de la région.
Des pays de l’Amérique Latine ont fait savoir le 19 mars dernier « qu’ils rejetaient toute intervention militaire en Libye ». Le chancelier argentin Héctor Timerman a mis en cause
le fait que ces attaques contre le territoire libyen menées par les États-Unis, la France et le Royaume-Uni, n’aient pas fait l’objet d’un large débat au Conseil de Sécurité ou à
l’Assemblée Générale des Nations Unies. Le président Uruguayen a, quant à lui, qualifié de « lamentable » l’attaque des forces des forces armées contre la Libye :
« Le remède est pire que la maladie ; Sauver des vies à coup de bombes est un contresens inexplicable. C’est à en pleurer. »
Surtout, cette offensive militaire ne trouve pas grâce aux yeux des peuples de la région, qui rejettent la figure dictatoriale de Kadhafi, mais qui refusent également de cautionner
toute nouvelle expression de l’impérialisme occidental. Le chef de la Ligue arabe Amr Moussa a critiqué dimanche les bombardements occidentaux sur la Libye, estimant qu’ils
s’écartent « de l’objectif d’instauration d’une zone d’exclusion aérienne, et ce que nous voulons c’est la protection des civils et pas le bombardement de
davantage de civils ».
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