Présidentielle 2012 : Quel candidat pour le Front de Gauche ?
Posté par communistefeigniesunblogfr le 29 janvier 2011
Tribunes – le 27 Janvier 2011
Quelle candidature pour le Front de gauche sans effacement de ses composantes ?
Des différences profondes et un débat avec Jean-Luc Mélenchon
Par Denis Durand, membre du Conseil national du PCF.
Sur son blog, à la date du 19 décembre, Jean-Luc Mélenchon revient sur l’appel de militants communistes « pour un rassemblement sans effacement du PCF ». Il conteste que des différences existent entre les élaborations les plus novatrices des communistes et ses propres propositions.
Signataire de cet appel, je me félicite de pouvoir ouvrir un dialogue sur ces différences dont je maintiens, contrairement à la perception que Jean-Luc Mélenchon peut en avoir, qu’elles sont profondes et systématiques. C’est en livrant aux citoyens tous les éléments du débat que nous pourrons construire des convergences, élaborer un programme populaire partagé et rassembler dans le Front de gauche.
1. Jean-Luc Mélenchon met en avant, comme élément premier de son programme économique, un « nouveau partage des richesses ». Mais cela n’est possible, à notre avis, que si l’on commence par changer la façon de produire les richesses, c’est-à-dire, en particulier, les critères qui guident les choix stratégiques des entreprises et des collectivités publiques, ainsi que leur financement.
2. Jean-Luc Mélenchon poursuit la tradition sociale-démocrate qui voit dans l’action de l’État le moyen essentiel d’une politique de gauche. De notre côté, nous croyons qu’une autre civilisation exigera l’essor de nouveaux services publics, avec de nouveaux pouvoirs des travailleurs et des citoyens, non seulement pour la transformation de l’État, mais aussi dans les entreprises, dans les banques (en particulier au sein d’un pôle financier public), dans les services publics, dans les régions, dans les instances européennes, dans les organisations internationales.
3. Jean-Luc Mélenchon ne manque pas de critiquer la dictature de la finance mais il n’indique pas, contrairement à nos propositions, comment la conquête de nouveaux pouvoirs sur le crédit bancaire permettrait de s’en affranchir.
Ainsi, à propos de la BCE, faire référence à un objectif de « plein-emploi » ne suffit pas. Nous jugeons indispensable d’appeler à se battre pour une autre construction monétaire européenne, pour que la Banque centrale européenne réserve ses refinancements aux crédits bancaires qui financent des investissements visant une sécurisation des activités professionnelles, jusqu’à une éradication complète du chômage.
De même, suffit-il d’affirmer que la BCE « devrait refinancer les titres de la dette publique sur le marché monétaire à des conditions au moins aussi favorables » que les dettes privées ? La BCE, comme toutes les banques centrales, le fait déjà. Il faut exiger que la BCE rachète des titres publics, mais à condition que ces titres financent le développement des services publics, objectif radicalement opposé à ceux des marchés financiers et aux politiques d’austérité.
De même, nos propositions de politique monétaire sont inséparables d’une autre mesure essentielle que Jean-Luc Mélenchon ignore : la création de fonds publics régionaux pour l’emploi et la formation, outils d’intervention économique des régions sur lesquels les travailleurs et les citoyens s’appuieraient pour pousser les banques à financer des investissements favorables à l’emploi.
Dans l’entreprise, le but ne peut pas se limiter à réformer le droit du travail « pour que toutes les parties prenantes à la création de richesse (actionnaires, salariés, collectivités publiques…) aient un égal droit d’intervention dans la gestion », comme l’écrit le programme du PG. Il s’agit de conquérir le maximum de pouvoirs et de droits d’intervention des salariés pour renverser les choix patronaux et imposer des choix répondant à des critères nouveaux, visant à développer les travailleurs et les populations.
Ces pouvoirs, il faut les conquérir « du local au mondial », jusqu’à transformer les relations monétaires internationales. L’apport original des économistes communistes est de montrer comment, à partir des droits de tirage spéciaux du FMI, on pourrait remplacer le dollar par une monnaie commune mondiale. Celle-ci contribuerait à libérer l’économie mondiale des marchés financiers, mais à une condition : qu’elle serve, à travers une création monétaire au plan mondial, à refinancer les banques centrales pour qu’elles favorisent sélectivement le développement d’un nouveau crédit et pour qu’elles souscrivent des titres de dette publique finançant l’expansion des services publics. Mais si tel est notre projet, quel sens peut bien avoir la proposition, avancée par Jean-Luc Mélenchon, de « sortir du FMI » ? Il s’agit bien plutôt de se battre, avec toutes les forces disponibles, pour refondre de façon très radicale le FMI, et en faire l’institution dont l’humanité a besoin pour maîtriser les conditions monétaires d’un développement de progrès.
La confrontation de nos convergences et de nos différences doit se poursuivre. L’affirmation des propositions communistes peut aller de pair avec l’adoption de projets précis par l’ensemble des parties prenantes du Front de gauche : notre proposition de loi sur les retraites en a été un exemple. Il reste que nos différences avec Jean-Luc Mélenchon renvoient, me semble-t-il, à des pesanteurs culturelles persistantes dont la gauche doit s’émanciper. D’où l’importance du choix d’un candidat pleinement porteur de propositions précises et cohérentes. C’est la force, à nos yeux, de la candidature d’André Chassaigne pour représenter l’ensemble du Front de gauche, sans effacement des formations qui le composent, et sans viser à « dissoudre » et à « coaguler » ses composantes.
Sur le même sujet, lire :
http://www.humanite.fr/25_01_2011- André chassaigne invite lePCF à se prononcer
http://humanite.fr/23_01_2011-Rencontre avec Jean-Luc-Mélenchon
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