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Croix : Beaumont, le ch’ti quartier de la bourgeoisie du Nord

Posté par communistefeigniesunblogfr le 19 août 2010

Croix : Beaumont, le ch'ti quartier de la bourgeoisie du Nord dans POLITIQUE 19 août 2010 – Cécile Rousseau

Ghettos de riches

A Croix dans le Nord

Le chti quartier discret de la bourgeoisie à Croix dans le Nord

Chez ces gens-là, Monsieur, on n’est pas bling-bling pour un sou, on les compte. Les riches industriels textiles du département se terrent dans le quartier Beaumont, vivant coupés du reste de la ville. Une avenue dessine une ligne de démarcation entre ces deux mondes.

Croix (Nord), envoyée spéciale.

«Je ne suis pas vraiment radin. Je suis économe. Par contre, c’est vrai que j’ai reçu des ministres au Flunch et que j’éteins la lumière qui reste allumée dans le couloir ! » Dans les colonnes de Nord Éclair en 2009, ­Gérard Mulliez, fondateur du groupe Auchan, cultive son image de riche discret, aux valeurs simples. Pas bling-bling pour un sou, les riches industriels du nord de la France, comme lui, se dénichent à Croix (Nord). Il faut s’éloigner du quartier de la gare, vestige d’une forte activité industrielle, pour aller au sud-est de la ville à la rencontre d’un îlot boisé, colonisé par les payeurs de l’impôt sur la fortune : le quartier Beaumont. Croix est dans le peloton de tête de l’ISF. 415 habitants sur ses 21 000 sont redevables. Avec un patrimoine moyen de 3,448 millions d’euros en 2008, la ville dépasse Neuilly.

L’avenue de Flandres matérialise la séparation entre Beaumont et le « reste » de Croix. À côté de la clinique du Parc, un mini-château Auchan, entouré de drapeaux européens, annonce la couleur. Il s’agit d’un centre de formation pour les employés de l’enseigne. De l’autre côté, se dresse la propriété des ­Mulliez. Pas de nom sur la sonnette. Sans guide, impossible de savoir que c’est sur le chemin de la Vacquerie que se cache la dynastie. Un grand portail électrique et une caméra de vidéosurveillance dissuadent les curieux de jeter un œil.

À Beaumont, tout le gratin de la bourgeoisie du Nord se retrouve « entre soi ». Depuis le XIXe siècle, c’est le lieu de villégiature des familles du textile et du commerce, qui y ont fait construire des demeures dans ce cadre verdoyant, proche de leurs usines de Roubaix et Tourcoing. Les voisins des Mulliez sont les Pollet (La Redoute), Toulemonde (Les 3 Suisses), Lepoutre (Tissage Lepoutre), Prouvost (Les Lainières de Roubaix), Despatures (Damart), Roussel, Dufour… Dans les sous-bois, l’endogamie sociale est de mise. Au fil des mariages, la plupart de ces familles ont intégré celle des Mulliez. Comme le souligne Benoît Boussemart, auteur de la Richesse des Mulliez (1). « Gérard Mulliez, c’est un peu le seigneur, c’est pour ça que je parle de féodalisme, en termes de pouvoir, avec des vassaux… Il y a une certaine hiérarchie au sein du clan. » L’ambiance Versailles n’est jamais loin à Beaumont. Les routes sont pavées uniquement sur les côtés pour laisser passer les chevaux. Des chapelles disséminées accueillent les patrons le dimanche, en bons ­chrétiens.

Mais le trip châtelain vire souvent à la paranoïa. Une grande partie des voies sont privées. Certaines grilles sont surmontées de barbelés. L’autre must sur les portails est l’inscription « chien méchant en liberté ». La résidence Roussel-Brame, regroupant une trentaine de maisons, a même été plus loin en s’enfermant littéralement dans le quartier. Roger Demortier, habitant de Beaumont et militant communiste, affirme qu’il y a encore deux ans la voie pouvait être empruntée par les riverains. Pourquoi cette crise de repli aiguë ?

 

Juste en face de la résidence clôturée, la villa Cavrois, classée monument historique, s’ouvre aux touristes en 2012. La venue de ces intrus passe mal dans le quartier ultra-résidentiel, d’après Roger Demortier qui fait partie du conseil de quartier.

Les habitants de Beaumont devront se faire une raison. Dès la rentrée scolaire, ils connaîtront un avant-goût d’agitation, avec l’installation de l’Edhec, école de commerce huppée de Lille. Cinq mille étudiants au cœur de la verdure, ça fait désordre. La cité des Cascades, des immeubles proches du campus, a déjà prévu d’installer un grillage. Roger Demortier assiste impuissant à la volonté de se parquer de ses riches voisins… Cet ancien ouvrier, habitant de Beaumont depuis sa naissance, se décrit comme le dernier des Mohicans parmi le club de l’ISF. « Croix ne doit pas être considérée comme une ville de riches car seule une petite partie de ses habitants concentre ce patrimoine qui reste majoritairement un héritage des empires industriels de la région », tempère un analyste de l’Insee.

Croix a deux visages. Pour les habitants du quartier populaire de Saint-Pierre, avec un taux de ­chômage avoisinant les 13 % et une maison de l’emploi qui croule sous les dossiers de demandeurs, Beaumont, c’est la quatrième dimension. « Ce n’est pas Croix ! On n’a pas l’impression d’être dans la même ville, à Saint-Pierre, on se sent oublié », peste une commerçante, en glissant que Régis Cauche, maire UMP de la ville, travaillerait chez Mulliez.

Pourtant, l’influence de « Papy Mulliez », comme le surnomment ses salariés, devrait se faire plus discrète dans la cité. Une partie du clan s’est récemment délocalisée en Belgique. D’après Benoît Bousssemart, une soixantaine de ménages Mulliez ont préféré passer la frontière pour payer moins d’impôts. « Le meilleur paradis fiscal, c’est la Belgique. Pas d’impôt sur les plus-values, ni en termes de propriété ou de succession, c’est génial ! » Beaumont, Beverly Hills du Nord, n’a plus la cote ?

(1) La Richesse des Mulliez. L’exploitation du travail dans un groupe familial, de Benoît Boussemart. Éditions Estaimpuis, 2008.

 

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