Le N-VA, parti indépendantiste, aurait obtenu 29 % des voix en Flandre et serait donc le grand vainqueur de ces élections . Du jamais vu dans ce pays.
En Wallonie et à Bruxelles, le PS serait en première position avec 36 % des voix.
Si ces résultats se confirment, ces élections anticipées risquent de creuser encore un peu plus le fossé politique qui sépare les deux communautés.
12 juin 2010 – Éditorial par Bruno Odent
Une crise politique symptôme
L’Europe va mal, et la crise qui menace de s’approfondir en Belgique à l’occasion du scrutin de ce dimanche en est l’un des symptômes les plus apparents. Une querelle linguistique autour de trois communes périphériques de Bruxelles a fait chuter le gouvernement Leterme et rendu les élections anticipées à hauts risques de ce dimanche incontournables. Les nationalistes flamands y ont le vent en poupe et entendent imposer un nouveau statut confédéral au pays, qui accorderait la plus grande autonomie à la région flamande, en attendant, espèrent-ils, une indépendance en bonne et due forme.
L’Europe, telle qu’elle se construit, est en bonne partie responsable du mal qui ronge aujourd’hui le pays. Pour une raison essentielle : cette Union européenne-là tire sa référence-clé du principe de compétition. Elle sape en son nom tout ce qui a pu ressembler à des filets de solidarité. Qu’ils aient été tendus au niveau local, régional ou national, ils sont à chaque fois vilipendés puis allégrement tailladés. Car, présentés comme autant de charges insupportables pour des patrons d’entreprise obsédés par la diminution des coûts sociaux et salariaux.
Aux yeux des nationalistes flamands, le sud du pays, désindustrialisé et appauvri, est devenu une région assistée. Les transferts publics de la Flandre vers la Wallonie sont donc, estiment-ils, injustes et contre-productifs. La logique de l’Europe du traité de Lisbonne qui entend faire jouer au maximum la concurrence entre États, entre régions, entre salariés, ne dit pas autre chose. Les nationalistes surfent sur cette logique. Comment s’étonner dès lors qu’ils aient aujourd’hui le vent en poupe ? Comme les séparatistes de la Ligue du Nord, en Italie, qui n’entendent plus payer pour le sud du pays « tire-au-flanc ». Comme le Pays basque ou la Catalogne espagnols qui ne veulent plus des péréquations de Madrid pour ces « paresseux » d’Andalousie, de Castille ou d’Estrémadure. L’Europe de la concurrence libre et non faussée est une aubaine pour les populistes de tout poil. On vient aussi d’en avoir la confirmation à la faveur des législatives néerlandaises de dimanche dernier.
La Belgique, elle, ne tient plus aujourd’hui que par le fil de la sécurité sociale. Insupportable, disent les nationalistes et le patronat flamand qui revendiquent en cœur une régionalisation des caisses sociales. Les premiers espèrent qu’elle leur permettra de dissoudre l’un de ces ultimes ciments qui maintiennent encore les briques de l’édifice belge, menacé de s’écrouler. Quand les seconds en attendent simplement une baisse de leurs prélèvements obligatoires pour doper leurs profits. Si l’on veut échapper à ces forces centrifuges qui prospèrent aujourd’hui dans toute l’Europe, il serait plus que temps de réagir. Au niveau des États comme au niveau européen.
Le symbole est terrible en effet : c’est une Belgique brinquebalante qui va prendre dans quelques jours les rênes d’une UE prise en otage par les agences de notation des marchés financiers et minée par la crise de l’euro. À Bruxelles et à Bruxelles, les symptômes sont les mêmes. Et un vrai traitement, celui qui préserve la Belgique et l’UE de l’éclatement, passe à chaque fois par la réhabilitation et le développement du principe de solidarité. Et donc par une refondation sociale de la construction européenne.
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