Mahmoud Darwich Le poète qui a écouté battre son cœur jusqu’à la fin
Posté par communistefeigniesunblogfr le 5 juin 2010
3 juin 2010 – Muriel Steinmetz
Mahmoud Darwich
Le poète qui a écouté battre son cœur jusqu’à la fin
Dans le Lanceur de dés et autres poèmes, qui paraît ces jours-ci en France, le poète palestinien Mahmoud Darwich dit adieu à son peuple.
Le Lanceur de dés et autres poèmes de Mahmoud Darwich, traduits de l’arabe (palestinien) par Elias Sanbar. Photographies d’Ernest Pignon-Ernest. Éditions Actes Sud. 88 pages, 21 euros.
L e grand poète palestinien Mahmoud Darwich disparaissait le 9 août 2008 des suites d’une opération du cœur. Un an plus tard, en 2009, son journal intitulé la Trace du papillon (été 2006-été 2007) paraissait chez Actes Sud sous la forme d’une autobiographie poétique portant sur une année (1).
Aujourd’hui, en France, sort un ensemble de textes sous le titre le Lanceur de dés et autres poèmes, dans la traduction d’Elias Sanbar. Le récit central de cette œuvre a déjà fait le tour du monde arabe à sa sortie, un mois avant la mort du poète. La présente publication, assortie de dessins et photographies d’Ernest Pignon-Ernest, a été préparée avec soin par son éditeur et ami, Farouk Mardam-Bey.
« Lorsque j’ai vu ses poèmes, écrits à la main, retrouvés sur sa table de travail à Amman, nous confiait récemment Farouk Mardam-Bey, j’ai bien remarqué que certains textes étaient semés de points d’interrogation à l’endroit d’un titre ou d’un vers. » C’est pourquoi l’actuel recueil, dans sa version française du moins, laisse de côté les poèmes jugés inachevés par l’éditeur.
Rien de plus troublant que ce Lanceur de dés, grand poème testamentaire qui commence par « Qui suis-je pour vous dire ce que je vous dis » et se termine par « Mais qui suis-je pour décevoir le néant ? » Le ton, d’une simplicité cardinale, a des accents élégiaques, comme si l’auteur s’adressait déjà de loin au lecteur et lui faisait un signe d’adieu amical. Le rythme s’accélère par endroits tant il semble que le temps est compté. Il est un passage de verbes en rafale qui épouse le rythme même de la tachycardie. Mahmoud Darwich écrit au conditionnel, cet allié du hasard qu’il nomme « le forgeron de nos destinées ».
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« L’histoire de la Palestine a toujours été une histoire plurielle. Et le conflit qui nous oppose aux Israéliens, sur le plan conceptuel, tourne autour de cela. Eux voudraient que l’histoire de la Palestine commençât avec leur histoire, c’est-à-dire depuis les siècles où ils peuplèrent et régnèrent sur cette terre. Comme si l’histoire s’était cristallisée et qu’il n’y avait rien avant et rien après. L’État d’Israël d’aujourd’hui serait le prolongement naturel de cette période. Nous, nous pensons que l’histoire de la Palestine débute depuis qu’il y a des hommes, du moins les Cananéens. Et si elle se poursuit avec la période juive, et nous ne cherchons pas à le nier, l’histoire de la Palestine est plurielle. Elle englobe aussi bien les Mésopotamiens, les Syriens, les Perses, que les Égyptiens, les Romains, les Arabes, plus tard les Ottomans. Son histoire s’est peut-être faite dans la violence ; il n’empêche qu’elle est le fruit de la rencontre de tous ces peuples. Cette pluralité est une richesse. Et je me considère comme l’héritier de toutes ces cultures et ne me sens aucunement gêné de dire qu’il y a une part juive en moi. Je n’arrive pas à concevoir une possession exclusive de ce territoire. Je ne réponds pas aux Israéliens qui prétendent être dans le prolongement du royaume d’Israël que je suis le prolongement des Cananéens. Je ne cherche pas à dire que j’étais là avant eux, je dis seulement : je suis le produit de tout cela et je l’accepte et je l’assume. »
Mahmoud Darwich, entretien à Libération, 10-11 mai 2003 (Source : oasisfle.com/)
+ d’infos sur :
http://mahmoud-darwich.chez-alice.fr/accueil.html
http://www.mondomix.com/actualite/774/mahmoud-darwich-la-valse-de-l-exil.htm
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