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Haïti : « Nous avons envers le peuple haïtien une dette qui remonte à Richelieu… »

Posté par communistefeigniesunblogfr le 14 janvier 2010

L’Éditorial de l’Humanité – 14 janvier 2010

Solidarité Haïti

Ils sont des dizaines de milliers là-bas à avoir besoin de nous, à avoir besoin de tout.

Par Patrick Le Hyaric

Comme toutes et tous, nous sommes saisis d’effroi et de douleur face au drame épouvantable qui frappe une nouvelle fois le peuple haïtien. Si proche de nous, nous avons envers lui une dette qui remonte à Richelieu, lui qui fit dominer l’île par la France en y pillant ses ressources et en y organisant l’esclavage.

Chaque minute compte pour des milliers et des milliers d’Haïtiens, enfants, femmes et hommes, encore ensevelis sous les décombres. Chaque instant est précieux pour soulager la peine des familles plongées dans le chagrin et la douleur d’avoir perdu un être cher quand ce n’est d’avoir tout perdu. Dans cette angoissante course contre la montre pour sauver le maximum de vies, il est bien que les États, dont la France et l’Organisation des Nations unies, s’engagent fortement.

C’est amplement justifié par le fait que cette tragédie a été considérablement aggravée par l’état de fragilité et de délabrement des infrastructures. On a du mal à imaginer comment la capitale, Port-au-Prince, a pu être ainsi plongée dans cette spirale destructrice, dans l’horreur et la désolation si rapidement. Si le bilan devient si dramatique, c’est aussi parce que ce pays a continué d’être dominé et pillé avec un plan d’austérité imposé par le Fond monétaire international, s’ajoutant aux violences de dictatures dont celle des Duvalier et des tontons macoutes, mais aussi aux méfaits de gouvernements corrompus. Des milliers de morts et de blessés auraient peut-être pu être évités si les populations avaient pu bénéficier d’une assistance médicale immédiate et d’un habitat plus solide.

Comment les puissants de ce monde continueront-ils de justifier qu’ils puissent dilapider chaque jour des sommes colossales dans le surarmement et les guerres ou pour sauver les grands banquiers de ce monde alors qu’ils laissent, comme à Haïti, des peuples aux mains nues dans la pauvreté la plus totale ? Cette effrayante tragédie se rajoute en effet au drame quotidien des 12 millions d’habitants de ce pays dont près des quatre cinquièmes survivent avec moins de deux dollars par jour. Nos frères haïtiens s’étaient fait entendre durant l’année 2007 avec les « émeutes de la faim ». Ils alertaient déjà contre un ordre mondial foncièrement égoïste qui les étrangle depuis deux siècles. Les puissants de la planète ne leur auraient-ils pas encore pardonné leur dignité conquise depuis 1804, année de l’indépendance de l’île ? Dès le début, les dominateurs et les impérialistes sanctionnèrent ce peuple en organisant contre lui un blocus commercial et en installant des présidents fantoches jusqu’à la mise sous tutelle du FMI. Voilà ce qui l’empêcha de gagner définitivement sa liberté totale, de construire son développement, de prendre en main son destin, jusqu’à vivre aujourd’hui dans un pays exsangue.

Nos amis haïtiens n’ont que trop subi le sang, les armes et la misère. Cela ne fait que renforcer encore l’importance vitale de la mobilisation internationale en marche, et notamment celle de la France, qui doit ressentir une responsabilité particulière vis-à-vis des populations d’Haïti. L’heure est maintenant à la solidarité active la plus large. Ils sont et seront des dizaines de milliers là-bas à avoir besoin de nous, à avoir besoin de tout : des médicaments, du matériel de base, des vivres, des moyens financiers pour reconstruire.

Ne perdons pas un seul instant ! Notre journal l’Humanité s’associe une nouvelle fois avec le Secours populaire français pour organiser la solidarité. Solidarité pour Haïti !

Secours populaire : Appel aux dons

 

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13 janvier 1898 : « J’ACCUSE…! », « un moment de la conscience humaine », « un exemple immortel »

Posté par communistefeigniesunblogfr le 14 janvier 2010

Le 13 janvier 1898, Émile Zola publie dans L’Aurore une lettre ouverte au président de la République Félix Faure sous le titre « J’accuse« .

L’Aurore, le 13 janvier 1898.

13 janvier 1898 :

540px-J%27accuse_-_Gallica_-Titre_1 dans HISTOIRE

documents iconographiques :  
  wikipedia.org/

Extrait :

« J’accuse le lieutenant-colonel du Paty de Clam d’avoir été l’ouvrier diabolique de l’erreur judiciaire, en inconscient, je veux le croire, et d’avoir ensuite défendu son œuvre néfaste, depuis trois ans, par les machinations les plus saugrenues et les plus coupables.

J’accuse le général Mercier de s’être rendu complice, tout au moins par faiblesse d’esprit, d’une des plus grandes iniquités du siècle.

J’accuse le général Billot d’avoir eu entre les mains les preuves certaines de l’innocence de Dreyfus et de les avoir étouffées, de s’être rendu coupable de ce crime de lèse-humanité et de lèse-justice, dans un but politique et pour sauver l’état-major compromis.

J’accuse le général de Boisdeffre et le général Gonse de s’être rendus complices du même crime, l’un sans doute par passion cléricale, l’autre peut-être par cet esprit de corps qui fait des bureaux de la guerre l’arche sainte, inattaquable.

J’accuse le général de Pellieux et le commandant Ravary d’avoir fait une enquête scélérate, j’entends par là une enquête de la plus monstrueuse partialité, dont nous avons, dans le rapport du second, un impérissable monument de naïve audace.

J’accuse les trois experts en écritures, les sieurs Belhomme, Varinard et Couard, d’avoir fait des rapports mensongers et frauduleux, à moins qu’un examen médical ne les déclare atteints d’une maladie de la vue et du jugement.

J’accuse les bureaux de la guerre d’avoir mené dans la presse, particulièrement dans L’Éclair et dans L’Écho de Paris, une campagne abominable, pour égarer l’opinion et couvrir leur faute.

J’accuse enfin le premier conseil de guerre d’avoir violé le droit, en condamnant un accusé sur une pièce restée secrète, et j’accuse le second conseil de guerre d’avoir couvert cette illégalité, par ordre, en commettant à son tour le crime juridique d’acquitter sciemment un coupable.

En portant ces accusations, je n’ignore pas que je me mets sous le coup des articles 30 et 31 de la loi sur la presse du 29 juillet 1881, qui punit les délits de diffamation. Et c’est volontairement que je m’expose.

Quant aux gens que j’accuse, je ne les connais pas, je ne les ai jamais vus, je n’ai contre eux ni rancune ni haine. Ils ne sont pour moi que des entités, des esprits de malfaisance sociale. Et l’acte que j’accomplis ici n’est qu’un moyen révolutionnaire pour hâter l’explosion de la vérité et de la justice.

Je n’ai qu’une passion, celle de la lumière, au nom de l’humanité qui a tant souffert et qui a droit au bonheur. Ma protestation enflammée n’est que le cri de mon âme. Qu’on ose donc me traduire en cour d’assises et que l’enquête ait lieu au grand jour !

J’attends. »

 Extrait de l’article :   « ZOLA 13 janvier 1898″ paru le 12 janvier 1998 dans l’Humanité

Avec ce texte, Zola réagit à l’acquittement d’Esterhazy qui vient de se produire deux jours plus tôt, le 11 janvier. Il s’insurge contre deux scandales : contre le fait qu’un innocent, Alfred Dreyfus, ait été condamné par un Conseil de guerre, en décembre 1894 ; mais surtout, contre le fait que le coupable du crime vienne d’être acquitté, par un second Conseil de guerre. (…) Son « J’accuse » est une réponse à l’acte d’accusation du Conseil de guerre, une reprise intellectuelle de cet acte d’accusation. Une contre-accusation, opposant aux ragots accumulés contre Dreyfus la réalité des fautes commises au nom de la raison d’État.

C’est pourquoi Zola n’accuse pas Estherhazy (le véritable coupable), ce qui peut sembler paradoxal, à première vue. Son propos est ailleurs. Il attaque les défenseurs de l’acte d’accusation de 1894 : ceux qui garantissent la légitimité (les responsables politiques et militaires Mercier, Billot, Boisdeffre…) ; ceux qui affirment la validité de ses preuves (les experts en écriture) et ceux qui en ont tiré des conclusions inacceptables (les deux Conseils de guerre. (…)

… le 13 janvier, l’auteur des « Rougon-Macquart » (…) s’adresse à un journal pour avoir une diffusion massive, offrir à tous sa « lettre ouverte ». (…) il rompt avec la tranquillité qui fondait jusque-là son existence ordonnée d’écrivain. Il commet un délit de presse, un acte conscient de diffamation, pour qu’un procès ait lieu et qu’on reprenne l’enquête de l’affaire Dreyfus. En accusant, Zola s’accuse lui-même, s’offrant volontairement aux coups de l’adversaire. Au nom de la vérité et de la justice.

ALAIN PAGES.

Vidéo : document ina.fr/J’accuse.

A (re)lire :

→ sur : LDH-Toulon.net/ :

« J’accuse » toujours d’actualité - Un texte de Jean-Pierre Dubois publié dans Libération, le 15 janvier 2008.

→  sur notre blog :
9 octobre 2009 : 150e anniversaire de la naissance d’Alfred Dreyfus

 

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