Les sportifs antillais soutiennent le mouvement de protestation
Posté par communistefeigniesunblogfr le 19 février 2009
d’après RFO.fr (extraits de l’article de Ismail Mohammed Ali)
La communauté antillano-guyanaise prépare une grande manifestation samedi 21 février à Paris pour marquer son soutien au mouvement de protestation du LKP et à la grève générale qui dure maintenant depuis cinq semaines à la Guadeloupe.
De nombreux sportifs tels Trésor, Pérec, Thuram, Flessel, Nisima, Aaron ou Gentil ont exprimé leur solidarité avec le peuple guadeloupéen. Certains d’entre eux devraient être présents à la manifestation du 21 février.
Marie-José Pérec :
A L’Equipe, elle a confié communiquer « aussi par téléphone avec ma famille et mes amis qui vivent là-bas, à Basse-Terre. Il y a un vrai malaise. Les Guadeloupéens ont été très déçus par notre président de la République, qui n’a pas eu un mot pour eux lors de son allocution télévisée du 5 février. Depuis, tous ont le sentiment d’être délaissés, méprisés (…) 60 000 personnes qui défilent dans les rues, c’est énorme pour une île qui compte 400 000 habitants. Les Guadeloupéens sont mécontents à raison. Au-delà de la lutte contre la vie chère, ils ont l’impression qu’on ne les écoute pas (…) Comprenez que leur revendications sont justes, avec un coût de la vie supérieur de 30 à 40 % plus élevé qu’en métropole. Il est important de prendre des décisions pour les aider à surmonter la crise et ne pas laisser les choses se dégrader. Ce qui me frappe depuis le début de la contestation, c’est que la majorité des manifestants est jeune, déterminée, prête à se battre jusqu’au bout. Et, je n’ai qu’une crainte : que les choses empirent. Ma famille, mes amis sont là-bas… »
Marius Trésor dénonce les riches…
Marius Trésor, capitaine de l’équipe de France de football demi-finaliste au Mondial 1982, a aussi réagit. Le natif de Sainte-Anne en Guadeloupe a déclaré que « les gens en ont assez de travailler pour les autres et de ne pas voir le fruit de leur travail. C’est vrai que les gens qui détiennent la richesse des îles ne font rien pour que cela change. J’ai vu et lu pas mal de déclarations de gens qui détiennent les supermarchés. Au lieu de faire en sorte que cela se calme, ils mettent au contraire de l’huile sur le feu. Les gens qui s’occupent d’importer et d’exporter la banane font des profits énormes sur le dos des producteurs ». Il s’est interrogé sur la pertinence et la justesse qu’« une tablette de chocolat vendue deux euros et quelques en France, puisse coûter jusqu’à huit euros là-bas ».
L’esclavage, toujours dans les mémoires
Certains sportifs ajoutent à la question de la vie chère des raisons liées à la carte sociologique de la société antillaise. Pascal Gentil n’est pas étonné par la gravité de la crise socio-économique frappant les Antilles. « Je ne suis finalement pas trop surpris de voir la situation évoluer de la sorte. C’est une situation à laquelle j’ai été confronté assez tôt. J’avais la chance de partir aux Antilles, tous les trois ans, avec mes parents et j’étais déjà stupéfait d’observer cette hausse des prix spectaculaire. Je me demandais pourquoi une plaquette de beurre coûte si chère aux Antilles. Il y avait déjà un climat social en latence. Quand on travail et que l’on n’arrive pas à subvenir aux besoins de sa famille, il est normal qu’à un moment donné on en arrive à taper du poing sur la table. Il faut réguler tout ça ! Soit les salaires augmentent, soit ils baissent les prix des matières premières. Il y a beaucoup de souffrances. Je pense que c’était primordial que les gens descendent dans la rue. Je salue sincèrement la dignité avec laquelle jusqu’à présent ces manifestations se sont déroulées. Ils l’ont fait avec beaucoup de dignité. Je tiens à féliciter les Antillais pour ça. Savoir aussi pour le cas de la Martinique que quelques milliers de personnes dirigent l’économie de tout un département… L’esclavage a été certes abolit mais une certaine forme d’esclavagisme perdure encore en quelque sorte. Ce ras-le-bol est légitime. Maintenant j’espère que le gouvernement fera ce qu’il faudra rapportera des réponses et appuiera là où il le faudra au niveau du privé pour trouver des solutions », argumente le double médaillé de bronze aux Jeux Olympiques d’Athènes (2004) et de Sydney (2000).
Limian Thuram :
« Si vous vivez en Guadeloupe, vous en connaissez la réalité de. Il faut seulement comprendre. S’il y a 60 000 personnes dans les rues, c’est qu’il y a une raison. On ne se rend pas compte que l’esclavage, c’était hier. Pour certaines personnes c’est très très loin, mais pour la société antillaise, c’est tout près, parce qu’on n’a jamais fait le deuil, jamais eu de discussion de fond. » Tout comme son homologue le taekwondoïste français, Lilian Thuram tient à rappeler que « l’histoire de la Guadeloupe, c’est l’histoire de l’esclavage, ça existe encore aujourd’hui. Il y a encore des gens qui dirigent la Guadeloupe et qui s’appellent les békés ». Les descendants des anciennes familles esclavagistes vivant concentrent ainsi bon nombre de critiques. Marie-José Pérec y va aussi de son couplet : « Avez-vous vu Les Derniers Maîtres de la Martinique ? Pour moi, cet état d’esprit est très difficile à supporter. Les Antillais n’ont pas suffisamment accès aux postes à responsabilité, dans les entreprises privées, dans l’administration. Il faut que cela change. Et aujourd’hui qui nous représente ? Le LKP, un comité populaire. J’ai vraiment peur que ça explose, qu’il y ait des morts. Il faut absolument parvenir à une entente. L’Etat français en a le pouvoir (…) Je suis très remonté, touché, inquièt. J’attends beaucoup de cette réunion [entre le président de la République et une délégation d’élus de l’Outre-mer toutes tendances politiques confondues] pour apaiser les esprits. La Guadeloupe fait partie de la France, ce n’est pas seulement une île à 7 000 kilomètres de Paris. Il faut vite dialoguer et communique… »
Pascal Gentil, qui reconnait n’avoir jamais mis un pied de sa vie dans une manifestation, se rendra pourtant, le 21 février prochain, à la grande mobilisation de solidarité aux mouvements sociaux antillais. Marie-José Pérec et d’autres sportifs de haut niveau ne devraient pas être loin de lui dans le cortège aux côtés de milliers d’autres Ultramarins.
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